Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/279

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peut-il te mettre en état de me servir, ou de secourir mon serviteur Bonthron ? — C’est une ressource que je ne recommande à Votre Honneur que pour la dernière extrémité, et seulement dans le cas où le combat se terminerait par la défaite de notre champion. Maintenant nous n’avons qu’à lui assurer que, s’il ne remporte pas l’avantage, nous saurons néanmoins le sauver de la potence, pourvu qu’il ne confesse rien qui puisse porter atteinte à l’honneur de Votre Seigneurie. — Ah ! oui !… il me vient une idée, nous pouvons faire plus encore ; nous pouvons faire prononcer par Bonthron un mot qui donnera du souci à celui que je dois maudire, car il est la cause de mon infortune. Allons au chenil du boule-dogue, expliquons-lui ce qu’il aura à faire dans chaque circonstance qui pourra se présenter. Si nous pouvons le décider à soutenir l’épreuve par le droit du cercueil, ce ne sera plus qu’une vaine parade, et nous sommes sauvés. S’il veut le combat, il est farouche comme l’ours harcelé par les chiens, et il pourra peut-être triompher de son adversaire ; dans ce cas, nous sommes encore sauvés, et de plus nous sommes vengés. Si Bonthron est vaincu, nous aurons recours à ton expédient ; et si tu prends habilement tes mesures, nous en profiterons, comme je te l’expliquerai plus tard, pour faire un pas de géant vers la vengeance de mes injures. Mais il me reste toujours une chance à craindre. Supposons que notre mâtin soit blessé à mort dans la lice, qui l’empêchera de murmurer quelque espèce de confession différente de celle que nous lui aurons recommandée ? — Et par Dieu, ce sera son médecin ! que je sois auprès de lui, et que je puisse seulement mettre un doigt sur sa blessure, croyez-m’en, il ne trahira pas vos secrets. — Allons, voici un démon de bonne volonté, qu’on n’a pas besoin d’exciter ni de pousser en avant. — Non, sans doute, quand il s’agit du service de Votre Seigneurie. — Nous allons donc faire la leçon à notre homme. Nous le trouverons docile, car, tout chien qu’il est, il distingue ceux qui le nourrissent de ceux qui le maltraitent, et il déteste notre ancien maître du fond du cœur pour quelques injurieux traitements qu’il a reçus de sa main. Nous nous concerterons ensuite sur l’exécution de ton projet, afin d’arracher le boule-dogue à la fureur de cette tourbe de bourgeois. »

Nous laisserons ce digne couple d’amis occupé de leur machination secrète, dont nous verrons plus tard les résultats. Quoique