Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/462

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train dans la cour du château de Geierstein. Il le désire d’autant plus vivement qu’il a su que ledit Arthur lui avait porté préjudice en s’emparant du cœur d’une certaine demoiselle de rang, à qui lui, Philipson, n’est et ne peut être autre chose qu’une connaissance ordinaire. Rudolphe Donnerhugel préviendra Arthur, par un mot, du lieu où ils pourront se rencontrer pour combattre à armes égales sur un terrain neutre. En attendant il sera, aussi souvent que possible, au premier rang dans les escarmouches. »

Le cœur du jeune Arthur battit violemment lorsqu’il lut ce défi, dont le ton piqué montrait l’état des sentiments de celui qui l’écrivait, et dénotait assez le désappointement de Rudolphe au sujet d’Anne de Geierstein, et ses soupçons qu’elle avait répondu à la tendresse du jeune étranger. Arthur trouva moyen d’envoyer une réponse au cartel du Suisse, l’assurant du plaisir avec lequel il attendrait ses ordres, soit au front de la ligne, soit ailleurs, suivant que Rudolphe le désirerait.

Cependant les deux armées s’approchaient toujours davantage l’une de l’autre, et les troupes légères se rencontraient parfois. Les stradiotes du territoire vénitien, espèce de cavalerie qui ressemblait à celle des Turcs, faisaient alors, du côté de l’armée bourguignonne, ce genre de service auquel ils eussent été admirablement propres, si on avait pu compter sur leur fidélité. Le comte d’Oxford observa que ces hommes, qui étaient sous le commandement de Campo-Basso, rapportaient toujours pour nouvelle que l’ennemi était en assez mauvais ordre et en pleine retraite. De plus, ils ne cessaient d’annoncer que divers individus, contre qui le duc de Bourgogne nourrissait une haine personnelle et particulière, et qu’il désirait vivement avoir en sa puissance, s’étaient réfugiés à Nanci. Ce fait augmentait beaucoup l’ardeur du duc à reprendre cette place, et cette ardeur devint impossible à maîtriser lorsqu’il apprit que Ferrand et ses alliés avaient emporté une position voisine appelée Saint-Nicolas. À la nouvelle de son arrivée, la plus grande partie des conseillers bourguignons, de même que le comte d’Oxford, protestèrent contre le projet d’assiéger une place aussi forte, quand une armée redoutable était assez proche pour la secourir. Ils représentèrent au duc le petit nombre de ses soldats, la rigueur de la saison, et la difficulté de se procurer des provisions ; ils soutinrent à Charles qu’après avoir fait un mouvement qui avait forcé l’ennemi à reculer, il devait remettre toute opération décisive au printemps. Charles essaya d’abord de répondre et de réfuter ces