Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/377

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sincère, et nos montagnes, défendues par des guerriers familiers avec la victoire, vous serviront de barrière contre l’Allemagne et l’Italie. En votre faveur, nous permettrons au comte Roment de traiter, et nous lui rendrons les pays que nous lui avons enlevés, à telles conditions que Votre Altesse elle-même jugera raisonnables. Quant aux offenses passées de vos lieutenants et gouverneurs sur la frontière, nous garderons le silence, et nous demeurerons persuadés que ces agressions ne recommenceront plus à l’avenir. Bien plus, et si c’est ma dernière offre, c’est aussi la plus importante, nous vous enverrons trois mille de nos jeunes gens pour vous seconder dans les guerres que vous pourrez entreprendre, soit contre Louis de France, soit contre l’empereur d’Allemagne. Ce sont des hommes qui diffèrent… je le puis dire avec fierté et sans mentir, de cette écume de l’Allemagne et de l’Italie qui se forme en bandes de soldats mercenaires. Et si le ciel décide Votre Altesse à accepter nos conditions, il y aura dans votre armée un corps d’hommes qui laisseront tous leurs cadavres sur le champ de bataille, avant qu’aucun d’eux manque à ses serments. »

Un homme basané, mais grand et beau, portant un corselet richement orné d’arabesques, se leva de son siège animé de la plus violente exaspération. C’était le comte de Campo-Basso, commandant des Italiens mercenaires de Charles, qui possédait, comme nous y avons déjà fait allusion, beaucoup d’influence sur l’esprit du duc, influence qu’il avait principalement acquise en se prêtant aux opinions et aux préjugés de son maître, et en présentant au duc des arguments spécieux pour le justifier de suivre toujours son caprice.

« On doit m’excuser, dit-il, si, en cette auguste présence, je prends la parole pour défendre mon honneur et celui de mes bonnes lances qui, s’attachant à ma fortune, sont venues avec moi d’Italie, servir le plus brave des princes de la chrétienté. Je pourrais sans doute ne pas m’offenser du langage insultant de ce rustre à cheveux gris, dont les paroles ne peuvent affecter un chevalier et un noble plus que les aboiements d’un chien de paysan ; mais lorsque je l’entends proposer d’unir ses troupes de bandits indisciplinables avec les troupes de Votre Altesse, je dois lui faire savoir qu’il n’y a pas dans mes rangs un palefrenier qui voulût combattre en pareille compagnie. Non, moi-même, attaché par mille liens de reconnaissance, je ne pourrais me résoudre à tirer l’épée au milieu de tels camarades. Je plierais mes bannières, et je mènerais