Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/358

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas à un gentilhomme anglais, jaloux de se montrer avec éclat aux fêtes solennelles de Provence, et à la sûreté duquel le duc daigne prendre le plus vif intérêt. Son Altesse lui recommande de traiter ses autres affaires, s’il se faisait qu’il en eût, avec prudence et secret. Son Altesse lui a aussi envoyé une couple de chevaux pour son usage… l’un genet, marchant à l’amble pour la route… l’autre, un vigoureux cheval flamand, tout bardé de fer, en cas qu’il se trouve en avoir besoin. Il sera important que mon jeune maître change de costume, et prenne des vêtements plus convenables à son rang véritable. Les gens de sa suite connaissent le chemin, et sont autorisés, en cas de besoin, à demander secours, au nom du duc, à tout fidèle Bourguignon. Je n’ai plus qu’à ajouter que plus tôt partira le jeune gentilhomme, plus sera probable la réussite de son voyage. — Je suis prêt à monter en selle, dit Arthur, je n’ai qu’à changer d’habits. — Et moi, ajouta son père, je ne désire aucunement le retarder dans la mission qui lui est confiée. Nous n’avons l’un et l’autre qu’à nous dire : Dieu soit avec vous ! Quand et où nous reverrons-nous, qui peut le dire ? — Je crois, dit Colvin, que la chose dépend beaucoup des mouvements du duc, qui peut-être ne sont pas encore arrêtés ; mais Son Altesse exige que vous demeuriez près d’elle, mon noble comte, jusqu’à ce que l’affaire dont vous êtes venu traiter avec lui soit complètement terminée. J’ai à vous dire quelque chose en particulier lorsque votre fils se sera mis en route. »

Pendant que Colvin parlait ainsi avec son père, Arthur, qui n’était pas à demi habillé lorsqu’il entra dans la tente, avait profité d’un coin obscur pour y changer le simple costume appartenant à sa condition supposée de marchand, contre un habit de voyage convenable à un jeune homme de qualité attaché à la cour de Bourgogne. Ce ne fut pas sans une sensation naturelle de plaisir que le jeune ambassadeur reprit des vêtements conformes à sa naissance, et que personne ne pouvait porter avec plus d’avantage que lui ; mais ce fut avec un sentiment plus vif encore qu’il se hâta, et aussi secrètement que possible, de passer autour de son cou et de cacher sous le collet et les plis de son riche pourpoint une petite chaîne d’or très mince, curieusement travaillée dans le genre qu’on nommait moresque. C’était le contenu de l’écrin qu’Anne de Geierstein lui avait remis dans la main au moment de leur séparation, pour alléger la peine du jeune homme, et peut-être la sienne propre. La chaîne était réunie aux deux extrémités par une petite plaque d’or, sur laquelle un poinçon ou une pointe de couteau avait tracé d’un