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L’Anglais, ne voyant personne paraître sur la porte, se mit à annoncer son arrivée en appelant à haute voix d’abord, puis en mettant pied à terre et en frappant de toutes ses forces et longtemps à chacune des portes de l’hôtellerie, mais sans attirer la moindre attention. Enfin la tête grisonnante d’un vieux domestique se montra à une étroite fenêtre, et d’une voix qui annonçait plutôt son mécontentement d’être dérangé que l’espoir de tirer quelque bénéfice de la venue d’un hôte, il lui demanda ce qu’il voulait.

« Est-ce ici une auberge ? répliqua Philipson. — Oui, » répondit brusquement le domestique ; et il allait se retirer de la fenêtre quand le voyageur ajouta :

« Et si c’en est une, peut-on s’y loger ? — Vous pouvez entrer, » fut la courte et sèche réponse du valet.

« Envoyez-donc quelqu’un prendre les chevaux, reprit Philipson. — Personne n’a le temps, » répliqua le plus rébarbatif des valets ; « il vous faut faire vous-même la litière à vos chevaux de la manière qui vous plaira le mieux. — Où est l’écurie ? » demanda le marchand, dont la prudence et le caractère n’étaient pas trop à l’épreuve de ce flegme hollandais.

Le drôle, qui semblait aussi avare de paroles que si à chacune d’elles, comme la princesse dans le conte de fée, il eût laissé tomber un ducat, lui montra seulement du doigt la porte d’un autre bâtiment extérieur, ressemblant plus à celle d’une cave que d’une écurie, et, comme ennuyé de cet entretien, il retira la tête et ferma vivement la croisée derrière l’hôte, comme il eût fait à un mendiant importun.

Maudissant l’esprit d’indépendance qui abandonnait un voyageur à ses propre ressources, Philipson, faisant de nécessité vertu, conduisit les deux bidets vers la porte qu’on lui indiquait comme celle de l’écurie, et se réjouit intérieurement de voir briller de la lumière à travers les fentes. Il entra avec son bagage dans un endroit assez semblable au donjon voûté d’un vieux château, grossièrement garni de râteliers et de mangeoires. Il était d’une longueur considérable, et, à l’extrémité, deux ou trois personnes s’occupaient à étriller leurs chevaux, à les panser, à leur distribuer leur provende.

Ce dernier article était livré par un vieux valet boiteux qui ne mettait la main ni à la brosse ni à l’étrille, mais qui se tenait assis, pesant le foin à la livre et comptant l’avoine par grain, à ce qu’il