Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/249

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val chargé de vos bagages : le misérable vous l’aurait-il enlevé ? »

C’était une question embarrassante pour Philipson, qui, ne songeant qu’à la douleur de quitter son fils, n’avait nullement décidé si le bagage resterait avec lui-même ou s’il serait transporté de l’autre côté du Rhin. Il fut donc pris comme en défaut par la question du prêtre, auquel il répondit avec un peu d’incohérence : « Je crois que mon bagage est au hameau… à moins que mon fils ne lui ait fait traverser avec lui le Rhin. — C’est une chose facile à savoir, répliqua le prêtre. »

Un novice, sortant à sa voix de la sacristie de la chapelle, reçut l’ordre d’aller demander au hameau si les paquets de Philipson, avec le cheval qui les portait, y avaient été laissés, ou si son fils ne les avait pas emmenés avec lui sur l’autre bord.

Le novice revint au bout de quelques minutes avec la bête de somme qu’Arthur, par commodité pour son père, avait laissée avec tout le bagage sur la rive gauche du fleuve. Le prêtre regardait attentivement, tandis que le vieux Philipson, montant sur son propre cheval, et prenant les rênes en main, souhaita le bonjour au prêtre noir dans les termes suivants ; « Adieu donc, père, adieu ! il faut que je me hâte avec mes ballots, puisqu’il est peu sage de voyager ainsi après l’arrivée de la nuit ; autrement je réglerai volontiers mon pas de manière à poursuivre ma route de compagnie avec vous, si vous voulez bien me le permettre. — S’il faut absolument que vous fassiez diligence, comme j’étais en vérité sur le point de vous y engager, dit le prêtre, sachez que je ne retarderai pas votre marche. J’ai ici un bon cheval, et Melchior, qui autrement aurait été à pied, peut remonter sur votre cheval de charge. Je vous propose cet arrangement, attendu qu’il ne serait pas prudent à vous de voyager seul la nuit. Je peux vous conduire à une auberge éloignée d’environ cinq milles, que nous atteindrons avant la fin du jour, et où vous serez convenablement logé pour votre argent. »

Le négociant anglais hésita un moment. Il ne se souciait guère de prendre un nouveau compagnon de voyage, et quoique la physionomie du prêtre fût plutôt belle, par rapport à son âge, telle en était pourtant l’expression qu’elle n’invitait pas à la confiance. Au contraire, il y avait quelque chose de mystérieux et de sombre qui obscurcissait son front, quoiqu’il fût haut, et une expression semblable qui jaillissait de son œil froid et gris annonçait la sévérité la dureté même de son caractère. Mais, malgré ces circonstances défavorables, le prêtre avait récemment rendu un éminent service à