Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/219

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vêtu de rouge, et appuyant ses deux mains sur l’épée nue que nous avons déjà eu l’occasion de décrire. À l’instant où Arnold Biederman se montra, et avant que le landamman pût ouvrir la bouche pour demander ce que signifiait ce qu’il voyait, le prêtre se recula, l’exécuteur avança, l’épée fut levée, le coup tomba et la tête de la victime roula sur l’échafaud. Une acclamation générale et de longs battements de mains, semblables à ceux par lesquels une nombreuse réunion approuve au théâtre un acteur qui joue bien, suivirent cet exploit de dextérité. Tandis que le corps sans tête faisait jaillir par les artères des ruisseaux de sang, qui étaient bus par le son dont l’échafaud était parsemé, l’exécuteur se présenta gracieusement et tour à tour aux quatre coins de l’estrade, saluant avec modestie, tandis que la multitude le félicitait par de bruyantes acclamations.

« Nobles chevaliers, gentilshommes de sang libre, et bons citoyens, dit-il, qui avez assisté à cet acte de haute justice, je vous prie de me rendre témoignage que ce jugement vient d’être exécuté d’après les formes de la sentence, d’un seul coup, sans hésitation et sans reprise. »

Les acclamations recommencèrent.

« Vive notre exécuteur Steinernherz, et puissent tous les tyrans lui passer par les mains ! — Nobles amis, » répliqua le bourreau en tirant une très profonde révérence, j’ai encore un mot à dire, et ce mot je le dirai avec orgueil. Dieu prenne en compassion l’âme de ce bon et noble chevalier Archibald d’Hagenbach. Il fut le patron de ma jeunesse et mon guide au chemin de l’honneur. J’ai fait huit pas vers la liberté et l’anoblissement sur les têtes de huit chevaliers nobles et libres, qui sont tombées par son autorité et d’après ses ordres ; et la neuvième, par laquelle je suis parvenu à mon but, est la sienne propre, en mémoire et reconnaissance de quoi je dépenserai cette bourse d’or qu’il m’a donnée il n’y a pas une heure, et même pour le repos de son âme. Gentilshommes, nobles amis, et maintenant mes égaux, La Ferette a perdu un noble, elle en a gagné un autre. Notre-Dame soit propice à l’ex-chevalier sir Archibald d’Hagenbach ! qu’elle bénisse et protége l’avancement de Stephen Steinernherz de Blutsacker ! maintenant libre et noble de droit. »

En finissant de parler, il prit la plume qui décorait la toque du défunt, et qui, souillée du sang de celui qui l’avait portée, gisait près de son cadavre sur l’échafaud, et la mettant à son propre