Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/217

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mon digne hôte, et permettez-moi de vous conduire vers un meilleur logement. »

Là, il fut interrompu par un bruit sourd que sembla produire la chute d’une barre de fer, et différent des mugissements lointains du tumulte populaire qu’ils entendaient encore retentir dans la rue comme la voix grave d’une mer éloignée et orageuse.

« Par saint Pierre-ès-liens ! » dit Arthur qui découvrit aussitôt la cause du bruit, « le geôlier a fermé la porte où elle lui a échappée des mains. La serrure en jouant nous a faits prisonniers, et nous ne devons attendre notre délivrance que du dehors… Holà ! geôlier, chien, misérable, ouvre-nous, sinon tu es mort ! — Il n’est probablement plus à portée d’entendre vos menaces, dit le vieux Philipson, et vos cris ne serviront de rien. Mais êtes-vous sûrs que les Suisses soient en possession de la ville ? — Nous en sommes les paisibles possesseurs, répondit le landamman, quoique aucun coup n’ait été frappé de notre côté. — Eh bien ! alors, reprit l’Anglais, vos camarades vous auront bientôt retrouvé. Arthur et moi nous sommes de pauvres gens inconnus, et notre absence aurait bien pu n’attirer aucune attention ; mais vous êtes, vous, un trop important personnage pour disparaître sans qu’on le remarque, surtout quand le nombre de vos gens est connu. — J’espère qu’il en sera ainsi, répliqua le landamman, quoiqu’il me semble que je fasse assez sotte figure, enfermé ici comme un chat dans un buffet quand il a volé de la crème… Arthur, mon brave garçon, ne vois-tu aucun moyen de faire sauter le verrou ? »

Arthur qui était allé examiner avec attention la porte, répondit négativement, et ajouta qu’il fallait bien prendre patience, et s’armer de courage pour attendre tranquillement leur délivrance, puisqu’ils ne pouvaient rien faire pour la hâter.

Cependant Arnold Blederman commençait à se fâcher de l’abandon où le laissaient ses fils et ses compagnons.

« Tous mes jeunes gens, disait-il, incertains si je suis mort ou vivant, prennent sans doute occasion de mon absence pour se livrer au pillage et à la licence… et le politique Rudolphe, je présume, ne s’inquiète pas si je dois jamais reparaître sur la scène… Le banneret et notre député Longue-Barbe, et cet imbécile de Bonstetten, qui m’appelle son ami, et tous mes voisins m’ont abandonné… Et pourtant ils savent que la vie du plus obscur d’entre eux m’est beaucoup plus précieuse que la mienne propre. Par le ciel ! on dirait d’un stratagème ; il semblerait que ces téméraires