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mes, un petit corps de gens armés qui s’avançaient vers La Ferette, et qu’il conclut avec raison être l’avant-garde de la députation suisse.

Il eut bientôt joint cette troupe, qui se composait de dix hommes avec Rudolphe Donnerhugel à leur tête. La figure de Philipson, couverte de boue et même tachée de sang en certains endroits, car sa chute dans le cachot lui avait valu une légère blessure, excita l’étonnement général, et tout le monde l’entoura pour savoir des nouvelles. Rudolphe seul parut insensible. Comme le visage des anciennes statues d’Hercule, la physionomie du massif Bernois était large et lourde, empreinte d’un air calme, indifférent et presque farouche, et ne changeait que dans les moments de la plus violente agitation.

Il écouta sans émotion l’histoire que conta Arthur Philipson sans se donner le temps de reprendre haleine, histoire dont le résumé était que son père se trouvait en prison et condamné à mort.

« Ne vous y attendiez-vous donc pas ? » dit le Bernois froidement. « Ne vous a-t-on pas averti ? Il aurait été facile de prévenir ce malheur, mais il peut être impossible de l’empêcher. — J’avoue… j’avoue, » répondit Arthur en se tordant les mains, « que vous avez été sages, et que nous avons été fous… Mais, oh ! ne pensez plus plus à notre folie, lorsque nous sommes réduits à une telle extrémité ! Soyez le brave et généreux champion dont la renommée vante la générosité et la noblesse… prêtez-nous secours dans cette affreuse circonstance. — Mais comment, et de quelle manière ? » répondit Rudolphe, qui hésitait encore. « Nous avons congédié les Bâlois qui étaient disposés à nous soutenir, tant votre exemple important a de poids sur nous. Nous ne sommes plus à présent qu’une vingtaine : comment venez-vous donc nous demander d’attaquer une ville de garnison, solidement fortifiée, et défendue par une troupe six fois plus considérable que la nôtre ? — Vous avez des amis dans la place, repartit Arthur. Je suis sûr que vous en avez. Que je vous parle à l’oreille… le prêtre noir m’envoie vous dire… À vous, Rudolphe Donnerhugel de Berne… qu’il vous attend, pour vous donner sa bénédiction, à la poterne du Nord. — Oui, sans doute, » repartit à son tour Rudolphe en échappant à Arthur qui voulait l’engager dans une conférence particulière, et parlant de manière que tous les assistants pussent l’entendre : « Il n’y a point le moindre doute, je trouverai à la poterne du Nord un être pour me confesser et me donner l’absolution, puis un billot,