Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/198

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je veux rester ici, moi, pour le sauver ou mourir !… Anne, ma chère Anne ! »

Elle garda le silence ; mais l’homme qui l’accompagnait répliqua d’une voix creuse, répondant assez bien à son apparence : « Parle, jeune homme, à ceux qui ont la permission de te répondre, ou plutôt garde le silence, et écoute mes instructions, qui seules peuvent te mettre en état de rendre à ton père la liberté, et de lui assurer la vie. »

Ils montèrent l’escalier, Anne de Geierstein marchant la première, tandis qu’Arthur, qui la suivait de près, ne pouvait s’empêcher de penser que son corps même produisait une partie de la lumière qui était réfléchie par la torche sur ses vêtements. C’était probablement l’effet de la croyance superstitieuse que le récit de Rudolphe lui avait fait adopter relativement à la mère d’Anne, et qui était confirmée par l’apparition soudaine de sa fille dans un lieu et dans une circonstance où elle devait être si peu attendue. Il n’eut cependant pas beaucoup de temps à réfléchir à sa présence ou à sa conduite, car elle montait l’escalier trop vite pour qu’il lui fût possible de la suivre alors, et il ne la revit plus lorsqu’il arriva sur le palier. Mais s’était-elle dissipée dans l’air, avait-elle détourné par quelque autre corridor ? On ne lui laissa point un instant de loisir pour l’examiner.

« Voilà votre chemin, » dit à Arthur son guide noir ; et en même temps il souffla son flambeau, puis, saisissant Philipson par le bras, il le conduisit par une sombre galerie d’une longueur considérable. Le jeune homme n’était pas toujours exempt de frayeur lorsqu’il songeait aux regards sinistres de son conducteur qui était armé d’une dague ou poignard qu’il pouvait lui plonger tout-à-coup dans le sein. Mais il ne pouvait se résoudre à redouter une trahison de la part d’un individu qui s’était trouvé et qu’il avait pu voir dans la compagnie d’Anne de Geierstein ; et dans son cœur il lui demanda pardon de la crainte qu’il avait sentie un moment, et se laissa conduire par son compagnon qui avançait d’un pas rapide mais léger, et lui recommanda à voix basse d’en faire autant. — Notre voyage, dit-il enfin, se termine ici. »

Comme il parlait, une porte s’ouvrit et ils entrèrent dans un sombre appartement gothique, garni de larges tablettes en chêne qui semblaient pleines de livres et de manuscrits. Tandis qu’Arthur promenait ses regards autour de lui, avec des yeux éblouis par l’éclat soudain du jour dont il avait été quelque temps privé, la porte