Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/187

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prouve qu’il est de sang noble, ou je ne parviendrai jamais moi-même à la noblesse. — Notre maître va composer avec lui, je présume, répliqua Kilian, voilà qu’il lui sourit. — Alors ne me crois jamais, dit l’homme écarlate ; il y a dans l’œil de notre patron Archibald un regard qui présage du sang, aussi sûr que la canicule annonce la peste. »

Tandis que les valets du seigneur Archibald d’Hagenbach conversaient ainsi à l’écart, leur maître avait engagé les prisonniers dans une longue suite de questions captieuses concernant leurs affaires en Suisse, leurs relations avec le landamman, et le motif de leur voyage en Bourgogne, questions auxquelles le vieux Philipson avait toujours répondu d’une manière directe et précise, excepté à la dernière. Il allait, disait-il, en Bourgogne pour l’intérêt de son commerce… ses marchandises étaient à la disposition du gouverneur, qui pouvait les retenir en tout ou en partie, s’il était disposé à en devenir responsable devant son maître. Mais son affaire avec le duc était d’une nature particulière, touchant certains objets de commerce dans lesquels d’autres étaient intéressés aussi bien que lui. Il déclara qu’il n’en conférerait qu’avec le duc seul, et s’attacha à faire bien sentir au gouverneur que, s’il éprouvait quelque dommage dans sa propre personne ou dans celle de son fils, le sévère mécontentement du duc en serait l’inévitable conséquence.

Hagenbach était évidemment fort embarrassé par le ton ferme de son prisonnier, et plus d’une fois il demanda conseil à sa bouteille, son oracle infaillible dans des cas d’une extrême difficulté. Philipson n’avait pas hésité à remettre au gouverneur une liste ou facture de ses marchandises, qui étaient d’un genre si séduisant que le seigneur Archibald la parcourut d’un bout à l’autre. Après être resté quelque temps dans une profonde méditation, il releva la tête et parla ainsi :

« Vous devez bien savoir, seigneur marchand, que la volonté du duc est qu’aucune marchandise suisse ne passe par son territoire, et que par conséquent, puisque, de votre propre aveu, vous êtes demeuré plusieurs semaines dans ce pays, et que même vous avez suivi un corps d’individus qui se donnent le titre de députés suisses, je suis autorisé à croire que ces objets de prix appartiennent plutôt à ces différentes personnes qu’à un seul individu d’aussi pauvre apparence que vous ; et si je jugeais convenable de demander une satisfaction pécuniaire, trois cents pièces d’or ne seraient pas une amende trop forte pour une pareille hardiesse de votre part : et