Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/179

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des jouets d’enfant… Et puis, si vous appelez toute notre garnison à l’attaque, à qui Votre Excellence confiera-t-elle la défense des autres portes et le tour des murailles ? — Fermez, barrez et enchaînez les portes et qu’on m’apporte les clefs ici. Personne ne sortira de la place avant que cette affaire soit terminée. Faites prendre les armes à quelques vingtaines de citoyens pour garder les murs, et veillez à ce qu’ils remplissent bien ce devoir, ou je les condamnerai à une amende qu’il leur faudra bien payer. — Ils murmureront. Ils disent que, n’étant pas sujets du duc, quoique la place soit provisoirement au pouvoir de Son Altesse, ils ne doivent pas être soumis au service militaire. — Ils mentent, les lâches esclaves ! Si je ne les ai pas employés jusqu’à présent, c’est parce que je méprise leur secours ; et aujourd’hui même, je ne recourrais pas à eux s’il s’agissait de toute autre chose que de regarder tout droit devant eux. Qu’ils obéissent, s’ils tiennent à leurs propriétés, à leurs personnes, à leurs familles ! »

Une voix grave répéta en ce moment derrière eux les paroles emphatiques de l’Écriture : « J’ai vu le méchant fleurir dans sa puissance comme un laurier ; mais je suis revenu, et il n’était plus. Je l’ai cherché, mais il ne s’est trouvé nulle part. »

Archibald d’Hagenbach se retourna d’un air sombre, et rencontra le regard sévère et sinistre du prêtre de Saint-Paul, portant l’habit de son ordre.

« Nous sommes occupés, mon père, dit le gouverneur, et nous écouterons votre sermon une autre fois. — Je viens mandé par vous, monsieur le gouverneur, dit le prêtre, autrement je ne serais pas venu de moi-même dans un lieu où je sais que mes sermons, comme vous dites, ne peuvent faire aucun bien. — Oh ! pardonnez, mon révérend père, dit d’Hagenbach. Oui, il est vrai que je vous ai fait appeler pour vous demander vos prières et votre bienveillante intercession auprès de Notre-Dame et de saint Paul, dans certaine besogne qui doit nous arriver ce matin, et dans laquelle, comme dit le Lombard, je pressens roba di guadagno[1]. — Seigneur Archibald, » répondit tranquillement le prêtre, « je crois et j’espère que vous n’oubliez pas le respect dû aux glorieux saints jusqu’à demander leur bénédiction pour des exploits tels que ceux qui ont été déjà trop souvent par vous accomplis depuis votre arrivée parmi nous… événement qui en lui-même est une preuve de la colère divine. Même permettez-moi de vous dire, si humble que je sois, que

  1. Littéralement, bien du profit. a. m.