Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/91

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qui se trouvait à une extrémité, et dont elle prenait plaisir, dit-elle, à soigner elle-même les habitants, sans être jamais troublée par aucune réflexion pénible sur leur sort futur.

Je ne vous ennuierai pas avec le détail des jardins, des serres chaudes, et de tout ce qui s’y trouve renfermé. Il faut qu’on ait dépensé des sommes considérables pour les créer d’abord, et ensuite pour les entretenir dans l’état où je les vis. Cette famille, à ce qu’il paraît, est alliée à celle du célèbre Millar, et participe de son goût pour les fleurs et l’horticulture. Mais, au lieu d’estropier des noms de botanique, je vous mènerai plutôt en pays civilisé, c’est à dire au jardin d’agrément que le bon goût de Josué ou de son père a étendu jusqu’au bord de la rivière. Contrairement à la simplicité de la maison, il était orné à un point extraordinaire. On y rencontrait divers compartiments artistement réunis ; et quoique le terrain total n’excédât pas cinq ou six acres, il était si bien varié qu’il paraissait quatre fois plus grand. Cet espace étroit renfermait des allées sombres et des promenades découvertes, une jolie cascade artificielle, une fontaine d’où partait un jet d’eau considérable dont les filets, brillant aux rayons du soleil, formaient un arc-en-ciel continuel. Il y avait un cabinet de verdure, comme disent les Français, pour se soustraire aux chaleurs de l’été, et une terrasse abritée au nord-est par une belle haie de houx, avec toutes ses luisantes épines, où l’on peut jouir des douceurs du soleil quand il se montre par les jours froids de l’hiver.

Je sais, Alan, que vous condamnerez tout cela comme vieux et de mauvais goût ; car depuis que Landseer a décrit les Leasowes, et parlé des imitations de la nature tentées par Brown, depuis que vous avez lu le dernier essai d’Horace Walpole sur le jardinage, vous êtes absolument pour la simple nature ; — vous détestez les escaliers en plein air, vous n’aimez plus que les bois et la solitude. Mais ne quid nimis[1]. Je ne voudrais pas gâter une scène naturellement grande et belle en y entassant une multitude de décorations artificielles ; je crois, néanmoins, qu’elles peuvent être tort intéressantes, quand la situation n’offre pas de beautés particulières.

En conséquence, lorsque j’aurai une maison de campagne, — qui peut dire si je l’attendrai encore long-temps ? — vous pouvez compter sur des grottes, des cascades et des fontaines ; même, si

  1. Rien de trop. a. m.