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LETTRE VII.

LE MÊME AU MÊME.


— CONTINUATION. —


Le petit Benjie fut donc envoyé avec le bidet par la rive gauche, tandis que le quaker et moi nous suivîmes la droite, comme la cavalerie et l’infanterie d’une même armée, occupant les bords opposés d’une rivière, et marchant dans la même direction. Mais pendant que mon digne compagnon m’assurait d’une promenade sur une pelouse charmante jusqu’à la maison, le petit Benjie, qui avait ordre de rester toujours en vue, trouva bon de dévier de la route indiquée, et, prenant à droite, il emmena le précieux Salomon, de manière que nous ne les aperçûmes plus.

« Le coquin veut monter dessus ! » s’écria Josué avec plus de vivacité qu’on ne lui en pouvait supposer après ses grandes protestations de patience.

Je m’efforçai de calmer ses craintes, tandis qu’il doublait le pas et se frottait le front d’un air vexé, et je l’assurai que, si l’enfant montait sur l’animal, il ne manquerait pas, dans son propre intérêt, de le conduire doucement.

« Vous ne le connaissez pas, » dit Josué, rejetant toute consolation, « lui, faire quelque chose doucement ! non, il mettra Salomon au galop, — il abusera de la patience du pauvre animal qui m’a porté si long-temps ! Oui, je me suis abandonné à ma propre faiblesse quand j’ai souffert qu’il touchât seulement la bride ; car jamais pareil mécréant n’a été vu dans le pays.

Il se mit à énumérer en détail tous les délits ruraux dont on accusait Benjie. On l’avait soupçonné de tendre des pièges aux perdrix. — Il avait été surpris par Josué lui-même, attrapant des oiseaux chanteurs à la glu. Il demeurait fortement convaincu d’avoir donné la chasse à plusieurs chats, à l’aide d’un basset qui le suivait toujours, et qui était aussi maigre, aussi malpropre, aussi malicieux que son maître. Enfin Benjie était accusé d’avoir volé un canard pour avoir le plaisir de le chasser avec le susdit basset, qui était adroit sur l’eau comme sur la terre. Je fis chorus avec mon ami, pour ne pas l’irriter encore d’avantage, et je dé-