Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/355

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— Eh bien ! capitaine, si vous consentez à risquer votre propre cou pour sauver celui d’un autre homme, pourquoi ne pas le mener aux vieilles filles de Fairladies ?

— Quoi ! — aux miss Arthuret ! — à ces damnées papistes ! — mais n’importe, — je l’y mènerai. J’ai ouï dire qu’elles ont reçu un jour l’équipage de tout un sloop qui avait échoué sur les sables.

— Vous pouvez néanmoins courir quelque risque, en vous détournant de votre chemin jusqu’à Fairladies ; car je vous répète que les requins battent tout le pays.

— N’importe ! — je puis trouver l’occasion d’en étendre quelques-uns sur l’herbe. Voyons, camarades, dépêchez la besogne. Avez-vous tous chargé vos bêtes ?

— Oui, oui, capitaine ; nous serons prêts dans une minute, répondit toute la bande.

— Le diable vous emporte, avec votre capitaine ! s’écria Nanty, — avez-vous envie de me voir pendre, si je suis pris ? — Tout le monde est compère et compagnon, ici.

— Un coup en partant, » dit le père Crackenthorp en présentant un flacon à Nanty Ewart.

— Pas la vingtième partie d’une goutte, répliqua Nanty. Me faut-il du courage hollandais à moi ? — Mon cœur est toujours assez ferme quand il y a chance de se battre ; d’ailleurs si j’ai vécu ivre, je veux mourir sobre. — Holà ! vieux Jephson, — vous êtes la meilleure de toutes ces brutes : — mettons notre jeune homme entre nous deux sur un cheval tranquille, et nous parviendrons à le tenir droit sur sa selle, j’espère. »

— Lorsqu’ils relevèrent Fairford de terre, il poussa un profond gémissement, et demanda d’une voix faible où ils allaient le mener.

« Dans un endroit où vous serez aussi heureux et tranquille qu’une souris dans son trou, répliqua Nanty, pourvu que nous puissions vous y conduire en sûreté. — Bonsoir, père Crackenthorp. — Empoisonnez-moi le quartier maître, s’il est possible. »

Les chevaux chargés se mirent alors en route et avancèrent au grand trot, se suivant les uns les autres à la file, et chaque cheval de deux en deux était monté par un vigoureux gaillard revêtu d’une grande casaque qui servait à cacher les armes dont la plupart étaient munis. Ewart fermait la marche de cette caravane, et, aidé de temps à autre par le vieux Jephson, il soutenait son jeune ami sur sa selle. Alan poussait par intervalles de profonds gémisse-