Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/274

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Bonne nuit, et joie à vous tous ;
Il ne faut pas que je demeure.
Amis, ennemis, parmi vous,
Chacun doit se montrer jaloux
De me voir partir à cette heure.


Il me sembla que la vivacité d’intelligence de Willie était beaucoup plus active que la mienne : comme un sourd accoutumé à ce qu’on lui parle par signes, il comprenait, dès les premières notes, le sens tout entier ; car il m’accompagna incontinent sur son violon, de manière à montrer d’abord qu’il savait bien ce que je voulais dire, puis à empêcher qu’on ne remarquât que je sifflais.

Sa réponse ne se fit pas attendre long-temps, et il me la transmit en jouant le vieil air martial de : —


Mettez le chapeau sur l’oreille,
Eh ! Johnnie, eh ! mon bon garçon !


Je répétai aussitôt en moi-même les paroles, et je fixai mon attention sur la stance suivante, comme très-applicable à ma situation : —


Mettez le chapeau sur l’oreille,
Vivement, et placez le bien ;
Vers la frontière alors, quoique l’on nous surveille,
Nous chercherons un aide, afin que ce vaurien
Reçoive une leçon à jamais sans pareille.
Allons, Johnnie, allons, le chapeau sur l’oreille.


Si ces sons indiquaient, comme je l’espère bien, le secours que j’avais à attendre de mes amis d’Écosse, je pus en conscience croire qu’une porte était ouverte à l’espérance et à la liberté. Je répondis sur-le-champ par l’air des strophes suivantes : —


Mon cœur est aux Highlands, mon cœur n’est pas ici.
Mon cœur est aux Highlands libre de tout souci,
Chassant le daim sauvage ou la biche légère :
Mon cœur est aux Highlands, en quelque lieu que j’erre.

Adieu, mes chers Highlands, adieu, pays du Nord ;
Berceau de la valeur, comme de la franchise :
En quelque lieu lointain que le sort me conduise,
Soyez toujours chéris, chéris jusqu’à la mort.


Willie joua aussitôt avec un degré de vigueur qui aurait rendu l’espoir au désespoir même, si l’on pouvait supposer que le dé-