Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/221

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cablait. — Je dormis, et dormis profondément, mais sans ressentir les heureux effets du sommeil.

Quand je m’éveillai, je me trouvai extrêmement mal ; les images du passé et les conjectures de l’avenir flottaient confusément dans ma tête. Je m’aperçus néanmoins que ma situation était changée, et beaucoup en bien. J’étais couché dans un bon lit, avec des rideaux tirés à l’entour ; j’entendais la voix basse et la démarche silencieuse des domestiques qui paraissaient respecter mon repos ; enfin il me semblait que j’étais entre les mains ou d’amis ou du moins de personnes inoffensives.

Je ne pourrai vous rendre qu’un compte fort confus des deux ou trois jours de souffrance et de fièvre que je passai alors ; mais s’ils étaient troublés par des rêves et des visions de terreur, d’autres objets, et de plus agréables, se présentaient aussi parfois à mon esprit. Alan Fairford me comprendra quand je lui dirai que j’ai vu, à n’en pas douter, la M. V. durant cet intervalle d’anéantissement presque total. Je fus visité par un médecin et saigné plus d’une fois. Je me rappelle aussi une pénible opération faite sur ma tête, où j’avais reçu un rude coup dans la nuit de l’émeute. Mes cheveux furent rasés et l’on m’examina l’os du crâne pour voir s’il n’avait pas été endommagé.

En voyant le médecin, il était naturel que je m’adressasse à lui pour connaître le motif de ma détention, et je me rappelle avoir essayé plus d’une fois de le faire. Mais la fièvre jetait comme un charme sur ma langue, et lorsque je voulais implorer l’assistance du docteur, je m’écartais aussitôt de ce sujet pour lui dire je ne sais quoi, — des absurdités. Un pouvoir auquel je ne pouvais résister donnait à ma conversation une direction étrange, et quoique je m’aperçusse de cette divagation d’esprit, je ne pouvais y remédier. Je résolus donc de patienter, jusqu’à ce que la faculté de penser et d’exprimer ma pensée me fût rendue avec ma santé ordinaire, qui avait reçu un violent échec des mauvais traitements que j’avais soufferts.