Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/211

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Joyeusement dansa la belle quakeresse,
Et le quaker aussi dansa joyeusement.


En ce moment d’alarme, je pensai reconnaître le jeu du ménétrier aveugle, de Willie le voyageur. Ils continuèrent d’avancer grand train et en bon ordre, tandis qu’en tête


Les fiers musiciens jouaient des airs guerriers.


Quand ils arrivèrent enfin près de nous, ils nous entourèrent par un mouvement soudain, et ce fut alors des cris universels : « Sus au quaker ! — sus au quaker ! — nous les avons tous deux, le quaker mouillé et le quaker sec.

« Pendons le quaker mouillé pour qu’il sèche, et jetons à l’eau le quaker sec pour le mouiller, » répliqua une autre voix.

« Où est la loutre de mer, John Davies, qui a détruit plus de poissons qu’aucun pêcheur d’ici à Ailsay-Craig ? » demanda une troisième voix. « J’ai un vieux corbeau à plumer, et un bissac pour mettre les plumes. »

Nous restions absolument passifs ; car penser à la résistance contre plus d’une centaine d’hommes armés de fusils, de javelines, de leviers en fer, de pieux et de gourdins, aurait été un acte de complète folie. M. Geddes, avec sa voix forte et sonore, répondit à la question qui concernait l’inspecteur d’une manière dont la courageuse indifférence les força à faire attention à lui.

« John Davies, dit-il, sera bientôt, j’espère, à Dumfries….

— Pour faire lâcher contre nous des habits rouges et des dragons, vieil et infâme hypocrite ! » répliqua-t-on.

On dirigea en même temps contre mon ami un coup que je parai avec le bâton que j’avais à la main. Je fus aussitôt renversé à terre, et je me souviens vaguement d’avoir entendu crier par les uns : « Tuez le jeune espion ! » tandis que d’autres se déclaraient, je crois, en ma faveur ; mais un second coup que je reçus sur la tête dans la bagarre me priva bientôt de l’usage de mes sens, et me jeta dans un état d’insensibilité d’où je ne sortis pas immédiatement. Quand je recouvrai connaissance, j’étais couché dans le même lit que j’avais quitté peu avant l’attaque, et mon pauvre compagnon, le petit chien de Terre-Neuve, à qui le tumulte de la bataille avait ôté tout courage, s’était blotti aussi près de moi qu’il avait pu, et restait couché, tremblant toujours, et gla-