Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/171

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che de viande froide, un consommé ou toute autre provision alimentaire : j’étais si pressé de voir votre fils, que je n’ai pas mangé une bouchée à mon dîner. »

Extrêmement satisfait, je pense, de rencontrer un aussi bon moyen pour clore efficacement la bouche de son client, mon père fit apporter un morceau de viande froide, auquel James Wilkinson, pour l’honneur de la maison, allait ajouter la bouteille d’eau-de-vie qui se trouvait encore sur le buffet ; mais, à un signe de mon père, il la remplaça par une cruche de petite bière. Peebles attaqua les vivres avec la voracité d’un lion affamé ; et cette diversion l’occupa si bien, tandis que mon père m’exposait l’affaire, que, tout en levant les yeux fréquemment vers lui, dans l’intention de l’interrompre, il ne pouvait se résoudre à renoncer à l’exercice agréable de ses mâchoires. Il revenait toujours au bœuf froid avec une avidité nouvelle, ce qui me fit conjecturer que de longtemps il n’avait rencontré pareille occasion de se rassasier. Laissant de côté beaucoup de phrases techniques, et grand nombre de détails légaux, je m’efforcerai de vous donner, en échange du conte de votre joueur de violon, l’histoire d’un plaideur, ou plutôt l’histoire de son procès.

« Pierre Peebles et Paul Plainstanes, dit mon père, entrèrent en société comme merciers et marchands de drap, en l’année… ; ils s’établirent dans Luckenbooths, et firent un commerce étendu à leur mutuel avantage. Mais il n’est pas besoin de le dire au docte avocat, societas est mater discordiarum, une société est souvent matière à procès. La compagnie se trouvant dissoute par consentement mutuel en l’année…, il fallut établir les comptes, et après certaines tentatives pour arranger les choses à l’amiable, l’affaire fut enfin portée devant les tribunaux, et se divisa en plusieurs procès distincts, dont la plupart ont été réunis par l’avocat général. C’est sur l’état de ces différents procès que l’attention de l’avocat doit particulièrement se porter. 1° Il y a l’action originaire de Peebles contre Plainstanes, Peebles assignant son ex-associé en paiement de 3000 livres, plus ou moins, balance de comptes due par Plainstanes. 2° Il s’agit d’une contre-action dans laquelle Plainstanes est demandeur, et Peebles défendeur, à propos de 2500 livres, plus ou moins, balance de comptes per contra, et due par Peebles. 3° Le septième procureur de M. Pleebes lui persuada d’intenter une action en règlement et débat de comptes, afin qu’on pût démontrer loyalement et clairement prouver de quel côté il était dû