Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/151

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sidait à Brokenburn-Foot, que je ne pouvais paraître à la célèbre miss Nickie Murray, patronne de vos réunions d’Édimbourg. La présidente dont je parle était une grosse réjouie d’une trentaine d’années, les doigts chargés d’un grand nombre de bagues la plupart en argent, et trois ou quatre en or ; ses jambes étaient bien dégagées jusqu’à une certaine hauteur de dessous les nombreux jupons courts blancs, bleus et écarlates, et laissaient voir des bas de la plus belle et la plus blanche laine, qui faisaient contraste avec ses souliers de cordouan attachés avec des boucles d’argent. Elle se déclara en ma faveur, et dit que « le brave et beau jeune homme ne devait pas s’ennuyer à mort en faisant toujours danser les autres, mais venir lui-même faire une contredanse ou deux.

— Et que deviendrai-je, moi, dame Martin ? dit Willie.

— Ce que vous deviendrez ? répliqua la dame ; méchante vieille barbe que vous êtes ! Vous pourriez jouer vingt heures de suite et fatiguer de la danse tout le pays avant de quitter votre archet, sinon pour boire un coup ou pour quelque aussi bonne raison.

— En vérité, bonne dame, répliqua Willie, vous n’avez pas si grand tort ; mais si vous enlevez mon camarade pour qu’il danse à son tour, il faut d’abord me verser à boire, et vous serez libre ensuite de vous trémousser comme Magde de Middlebie. »

La cruche ne se fit pas attendre ; mais pendant que Willie s’humectait le gosier, il entra dans la hutte une nouvelle compagnie qui attira soudain mon attention et glaça la galanterie avec laquelle j’allais offrir ma main à la Thétis aux fraîches couleurs, à la taille bien prise et aux bas blancs, qui avait obtenu l’affranchissement de ma servitude musicale.

Ce n’était rien moins que la vieille femme que le laird avait appelée Mabel, accompagnée de Cristal Nixon, domestique mâle du laird, et de la jeune personne qui avait dit le bénédicité lorsque j’avais soupé chez lui.

Cette jeune personne, — Alan, vous êtes à votre manière un peu devin ; — cette jeune personne que je n’ai pas décrite, et que vous avez soupçonnée pour cette raison même ne pas m’être indifférente, — n’est réellement pas, je suis fâché de le dire, aussi prudente qu’elle devrait l’être. Je n’emploierai pas le mot amour en cette occasion ; car je m’en suis trop souvent servi à propos de caprices et de fantaisies passagères, pour échapper à vos railleries, si je voulais m’en servir maintenant. C’est une expression, je l’avouerai, que j’ai employée, — un romancier dirait profa-