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après son jugement, et en bornant sa punition à un exil perpétuel.

Ces complots jacobites se succédaient les uns aux autres comme les bouillons d’une fontaine ; et le Chevalier jugea l’un d’eux assez important pour se risquer lui-même dans la périlleuse enceinte de la capitale britannique. C’est ce que l’on voit dans les anecdotes du temps du docteur King.

« Septembre 1750. — Je reçus un billet de lady Primrose, qui exprimait le désir de me voir à l’instant. Aussitôt que je fus chez elle, elle me conduisit dans son cabinet de toilette, et me présenta à… (au Chevalier sans doute) ; si je fus surpris de le trouver là, je le fus encore bien plus en apprenant les motifs qui lui avaient fait hasarder un voyage en Angleterre, dans les circonstances actuelles. L’impatience de ses amis qui l’entouraient dans l’exil leur avait suggéré un plan impraticable ; et quand même ce plan eût présenté quelque chance de réussite, les préparatifs pour le mettre à exécution n’étaient pas même commencés. Il fut bientôt convaincu qu’il s’était fait illusion ; et, après un séjour à Londres de cinq jours seulement, il retourna au lieu d’où il était venu. » Le docteur King était, en 1750, un zélé jacobite, comme on peut l’inférer de l’entrevue que le prince voulut avoir avec lui dans cette circonstance, ainsi que de sa qualité de correspondant du Chevalier. Lui, et quelques autres hommes de sens et d’observation, commencèrent à désespérer de faire leur fortune dans le parti qu’ils avaient choisi. Certes, il n’était pas sans dangers ; car, pendant la visite même dont nous venons de parler, un des domestiques du docteur King remarqua la ressemblance de l’étranger avec le buste bien connu du prince Charles.

Nous laisserons raconter au docteur King lui-même la circonstance qui lui fit rompre ses engagements avec les Stuarts : « Quand il (Charles-Édouard) était en Écosse, il avait une maîtresse nommée Walkinshaw, dont la sœur était dans ce temps femme de charge à Leicester House, poste qu’elle occupe encore aujourd’hui. Quelques années après qu’il eut été relâché de sa prison, et conduit hors de France, il envoya chercher cette jeune fille, qui prit bientôt un tel ascendant sur lui, qu’elle connaissait tous ses projets, et qu’il lui communiquait sa correspondance secrète. Aussitôt que cela fut connu en Angleterre, toutes les personnes de distinction qui lui étaient attachées furent grandement alarmées : elles pensaient que cette femme dissolue avait été placée dans la maison du prince par les ministres an-