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qui servait de salon de compagnie. Cet appartement était assez agréable, les fenêtres donnant sur le côté méridional du palais d’Holy-Rood, sur la montagne gigantesque d’Arthur’s Seat, et sur la chaîne de rochers appelée Salishury Crags, sites tellement sauvages, que l’esprit avait peine à concevoir qu’ils existassent dans le voisinage d’une ville populeuse. Les tableaux qui ornaient le salon venaient des pays étrangers, et quelques-uns d’entre eux avaient un mérite réel. Mais, pour voir les chefs-d’œuvre, il fallait être admis dans le sanctuaire même du temple, et avoir la permission de tirer un rideau de tapisserie qui séparait l’extrémité du salon du cabinet de toilette de mistress Martha. C’était un appartement charmant, dont il serait difficile de décrire la forme, tant il y avait de réduits, de renfoncements garnis de tablettes d’ébène, de bois orné moulu d’or ou de laque du Japon, les unes garnies de livres, dont mistress Martha avait une collection remarquable, les autres de porcelaine de la Chine, de coquillages et de curiosités de toute espèce. Dans une petite niche, à demi cachée par un rideau de soie cramoisie, était suspendue une armure complète d’acier brillant, et ornée d’argent, qui avait été portée à quelque affaire mémorable par sir Bernard Bethune, dont j’ai déjà parlé. Au dais même qui surmontait la niche était suspendue l’énorme épée avec laquelle le père de mistress Martha avait tenté, en 1715, de changer les destinées de la Grande-Bretagne, ainsi que l’esponton que portait son frère aîné, comme commandant d’une compagnie de la garde noire[1], à Fontenoy.

Il y avait là quelques tableaux de l’école italienne et de l’école flamande, dont l’authenticité était reconnue, des bronzes antiques, et d’autres raretés que ses frères où elles avaient recueillis pendant leurs voyages dans les pays étrangers. En un mot, ce cabinet était un lieu où la paresse était tentée de devenir studieuse, et l’étude de devenir paresseuse, où la gravité pouvait trouver mille sujets de s’égayer, et la gaieté mille sujets de devenir grave.

Je ne dois pas oublier de dire que cet appartement, pour soutenir dignement ses droits au nom du cabinet de toilette, était orné d’un superbe miroir entouré d’un cadre en filigrane d’argent, d’une belle toilette, dont la chemise était de dentelle de

  1. Régiment écossais en costume national. a. m.