Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/306

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et ni la vigueur ni le courage d’Hartley ne lui eussent peut-être sauvé la vie, si Winter ne se fût rendu maître de la main droite du général, et ne fut parvenu à le désarmer.

« Je suis votre prisonnier ! dit-il. Alors traitez-moi avec humanité… et laissez-moi voir ma femme et mes enfants.

— Vous les verrez demain, répondit Hartley ; suivez-nous à l’instant, et sans la moindre résistance. »

Le général Witherington suivit, comme un enfant, avec l’air d’un homme qui souffre pour une cause dont il se fait gloire.

« Je ne suis pas honteux de mes principes, disait-il… je mourrai volontiers pour mon roi. »

Sans irriter sa frénésie, en contrariant l’idée singulière qui occupait son imagination, Hartley continua de garder sur le malade l’empire qu’il avait su prendre. Il ordonna qu’on le conduisît à son appartement, et le fit mettre au lit. Il lui administra une forte potion calmante, et faisant coucher un domestique dans la chambre, il veilla l’infortuné jusqu’à la pointe du jour.

Le général Witherington se réveilla avec l’usage de sa raison ; il comprit sa situation réelle, comme le prouvaient ses gémissements, ses sanglots et ses larmes qu’il cherchait à cacher. Quand Hartley s’approcha de son lit, il le reconnut parfaitement, et dit : « Ne me craignez pas… l’accès est passé… laissez-moi maintenant, et occupez-vous de cet infortuné. Qu’il quitte l’Angleterre aussi promptement que possible, qu’il aille où son destin l’appelle, et où nous ne pourrons jamais nous rencontrer. Winter connaît mes besoins et prendra soin de moi. »

Winter donna le même avis. « Je puis répondre maintenant, dit-il, de la sûreté de mon maître ; mais, au nom du ciel, empêchez qu’il ne revoie jamais ce jeune homme endurci ! »