Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/237

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caractère, ses progrès et su capacité. Il ajouta qu’il agissait ainsi dans l’intention de mettre M. Monçada à même de juger comment il faudrait diriger la future éducation du jeune homme. « Richard, observait-il, était arrivé à un âge où l’éducation, perdant son caractère primitif et général, se divise en plusieurs branches, conduisant chacune aux différentes connaissances qui sont propres à chaque profession particulière : il était par conséquent devenu nécessaire de décider vers quelle carrière on dirigerait le jeune Richard ; il ferait, pour sa part, tous les efforts imaginables, afin de réaliser les souhaits de M. Monçada ; car les aimables qualités de ce jeune garçon le lui rendaient aussi cher, à lui qui n’était que son curateur, qu’il aurait pu l’être à son propre père.

La réponse, qui arriva dans le cours des huit ou dix jours suivants, était plus longue que d’habitude, et écrite à la première personne : « M. Grey, y était-il dit, la seule fois que nous nous sommes rencontrés, c’était dans des circonstances qui ne pouvaient pas nous faire connaître favorablement l’un à l’autre. Mais j’ai l’avantage sur vous, puisque, connaissant les motifs qui vous donnent une mauvaise opinion de moi, je pouvais les respecter et vous respecter vous-même ; tandis que vous, dans l’impossibilité d’apprécier les raisons… je veux dire, ignorant le traitement infâme que j’avais reçu, vous ne pouviez comprendre les raisons qui me faisaient agir. Moi, privé de ma fille unique par le fait d’un scélérat, elle, dépouillée de son honneur, je ne puis me résoudre à voir une créature innocente pourtant, dont l’aspect doit toujours me rappeler honte et vengeance. Gardez le pauvre enfant près de vous… élevez-le pour votre propre état ; mais veillez à ce qu’il ne vise pas à remplir dans la vie une profession plus haute que celle dont vous vous acquittez dignement. Veut-il devenir fermier, homme de loi à la campagne, ou médecin exerçant, enfin suivre un genre de vie modeste, les moyens d’établissement et d’éducation lui seront abondamment fournis. Mais je dois vous avertir, lui et vous, que toute tentative pour le rapprocher de moi plus que je ne puis spécialement le permettre, sera suivie de la cessation absolue de ma faveur et de ma protection. Je vous ai fait connaître ma volonté, j’espère que vous agirez en conséquence. »

La réception de cette lettre détermina Grey à avoir quelque explication avec le jeune homme lui-même, pour apprendre s’il se sentait de l’inclination vers un des états dont le choix lui était laissé ; convaincu en même temps, d’après la docilité de son ca-