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la garde du docteur et de sa respectable épouse, qui promirent une seconde fois d’avoir pour elle toute espèce d’attention. Pour qu’ils exécutassent leur promesse plus scrupuleusement, l’étranger glissa une bourse de vingt guinées dans la main du docteur (car cette histoire remonte aux jours de l’âge d’or), comme arrhes d’une récompense vraiment libérale, et le supplia de n’épargner aucune dépense pour fournir tout ce qui était nécessaire ou agréable à une personne de la condition de cette dame, et à l’être faible auquel on pouvait s’attendre à la voir donner immédiatement naissance. Il annonça alors qu’il retournait à l’auberge, où il pria qu’un messager lui fût dépêché au moment même où l’événement attendu aurait lieu.

« Cette dame est de haut rang, dit-il, et elle est étrangère. N’épargnez pas la dépense. Nous avions le projet de gagner Édimbourg, mais un accident nous a forcés de changer de route. » Il répéta encore une fois : « N’épargnez pas la dépense et tâchez que la dame puisse continuer son voyage le plus tôt possible.

— Voilà, répondit le docteur, qui dépasse mon pouvoir. La nature ne doit jamais être hâtée, et elle se venge de toute tentative à cet égard.

— Mais l’art, répliqua l’étranger, peut beaucoup faire ; « et il tira une seconde bourse qui paraissait aussi pesante que la première.

« L’art, dit le docteur, peut se récompenser, oui ; mais s’acheter, non. Vous m’avez déjà plus que suffisamment payé pour donner à votre dame les plus grands soins que je lui puisse donner ; si j’acceptais encore cet argent, ce serait vous promettre, implicitement du moins, des choses qu’il n’est pas en ma puissance de tenir. On prendra tous les soins possibles de votre dame : c’est le meilleur moyen de la mettre promptement en état de voyager… Maintenant, retournez à l’auberge, monsieur, car on peut avoir besoin de moi sur-le-champ, et nous n’avons encore songé ni à une garde pour madame, ni à une nourrice pour l’enfant.

— Un moment encore, docteur… Quelles langues entendez-vous ?

— Je puis parler le latin et le français, assez pour que l’on me comprenne ; de plus, je lis un peu l’italien.

— Mais ni le portugais ni l’espagnol ? continua l’étranger.

— Non, monsieur.

— C’est malheureux ; mais vous pouvez vous faire comprendre