Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/148

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d’Elspat, il lui aurait été impossible en ce moment de dire positivement quelle conduite il était déterminé à tenir. Il n’y avait qu’un seul point sur lequel il fut fixé : il voulait attendre son sort, quel qu’il pût être, sans ajouter à la faute, bien involontaire, d’avoir manqué à sa parole, celle de chercher à se soustraire à son châtiment. Il croyait devoir cet acte de dévouement à son honneur et à celui de ses compatriotes. Auquel de ses camarades pourrait-on se fier à l’avenir, si lui-même était considéré comme ayant manqué à ses serments et trahi la confiance de ses chefs ? Et quel autre que Hamish Beam Mac Tavish serait accusé par les montagnards d’avoir confirmé les soupçons et justifié la défiance que le général saxon avait conçus contre leur bonne foi ? Il était donc fermement résolu à attendre son sort. Mais avait-il l’intention de se remettre paisiblement entre les mains de ceux qui seraient chargés de l’arrêter, ou bien avait-il formé le projet de leur opposer de la résistance, afin de les provoquer à le tuer sur la place ? C’était une question à laquelle il n’aurait pu répondre lui-même. Son désir de voir Barcaldine, et de lui expliquer le motif qui l’avait empêché d’être de retour au temps fixé, le portait à suivre le premier plan de conduite. La crainte de subir un supplice déshonorant et d’avoir à entendre les reproches amers d’Elspat l’excitait fortement à adopter le dernier et le plus dangereux. Il abandonna au hasard le soin de sa conduite dans cette crise terrible, et il n’attendit pas long-temps ce moment redouté.

La nuit approchait ; l’ombre gigantesque des montagnes s’étendait vers l’orient, tandis que, vers l’occident, leurs sommets brillaient encore de l’éclat de la pourpre et de l’or. De la porte de la cabane on distinguait encore parfaitement la route qui forme un circuit autour du Ben Cruachan, lorsqu’un détachement de cinq soldats montagnards, dont les armes étincelaient aux derniers rayons du soleil, apparut tout à coup dans le lointain, à l’endroit où le grand chemin débouche de derrière la montagne. L’un des soldats était en avant des quatre autres, qui marchaient deux à deux, selon les règles de la discipline militaire. Il était incontestable, d’après les fusils qu’ils portaient, ainsi que d’après leurs toques et leurs plaids, que c’était un détachement du régiment d’Hamish, conduit par un sous-officier ; et l’on ne pouvait douter du motif qui les conduisait sur les bords du lac Awe.

« Ils avancent à grands pas, dit la veuve. Dieu sait s’ils s’en retourneront tous vite ou lentement. Mais ils sont cinq : le nombre