Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/134

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Vraiment, reprit la mère, je t’assure que tu te trouveras mieux dans un instant ; repose-toi seulement une demi-heure, rien qu’une demi-heure. D’ici à l’aurore il y a encore huit heures ; et lorsqu’elle paraîtra, le fils de ton père aura encore assez de temps devant lui pour faire son voyage.

— Il faut que je vous obéisse, ma mère, je sens qu’il le faut, » dit Hamish dont les paroles étaient presque inarticulées ; « mais appelez-moi dès que la lune se lèvera. »

Il s’assit sur le lit, se pencha en arrière, et au même instant il tomba dans un profond sommeil. Pour Elspat, le cœur palpitant de joie, comme une personne qui vient de mettre à exécution une entreprise difficile, elle se mit affectueusement à ranger le plaid autour de l’imprudent dormeur, auquel son amour extravagant devait être si fatal ; et pendant cette occupation, elle exprimait, par des paroles de tendresse et de triomphe, les sentiments dont son âme était agitée :

« Oui, s’écria-t-elle, agneau de mon cœur, la lune se lèvera et se couchera pour toi, ainsi que le soleil ; mais non pour éclairer tes pas loin de la terre de tes pères, ni t’annoncer l’heure d’aller servir le prince étranger ou l’ennemi de ta race ! Jamais je ne serai livrée à un fils de Dermid pour être nourrie comme une esclave ; mais celui qui est ma joie et mon orgueil sera mon gardien et mon protecteur. On dit que le pays des montagnes est changé : mais je vois le Ben Cruachan élever sa tête audacieuse plus haut que jamais dans les cieux. Nul n’a fait paître encore ses troupeaux dans les profondeurs du lac Awe, et ce chêne que voici ne se courbe pas encore comme un saule. Les enfants des montagnes seront tels que leurs pères jusqu’à ce que les montagnes elles-mêmes soient mises de niveau avec les vallées. Dans ces forêts sauvages, qui nourrissaient jadis des milliers de braves, il reste encore quelque subsistance et quelque refuge pour une vieille femme et un vaillant jeune homme issu de la race ancienne et fidèle aux mœurs de ses pères. »

Tandis que cette mère insensée se félicitait ainsi du succès de son stratagème, nous devons indiquer au lecteur les moyens dont elle s’était servie. La vie errante et sauvage lui avait appris les vertus des simples et des drogues végétales. Avec des herbes qu’elle savait choisir et distiller, elle guérissait plus de maladies que les gens de l’art ne pourraient aisément le croire. Elle en employait quelques-unes à teindre le tartan, et à lui donner ses bril-