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Bourgogne ! » lui apprirent qu’une partie des assiégeants arrivait par l’autre extrémité de la rue, qui était fort étroite, et que par conséquent la retraite lui devenait impossible.

« Conrad, dit-il à son lieutenant, prenez avec vous tous ces braves gens, chargez vigoureusement les coquins qui s’apprêtent à nous tomber sur les bras, et tâchez de vous frayer passage à travers leurs rangs. Quant à moi, tout est dit : j’ai toujours combattu en brave, maintenant le Sanglier est aux abois ; cependant je veux encore dépêcher aux enfers quelques-uns de ces vagabonds d’Écossais, afin qu’ils aillent y annoncer mon arrivée. »

Conrad obéit, et, à la tête du petit nombre de soldats qui lui restaient, se précipita vers l’extrémité de la rue, dans le dessein de charger les Bourguignons et de se frayer un passage au milieu d’eux. Cinq ou six des plus braves et des plus dévoués, déterminés à périr avec leur chef, restèrent auprès de de la Marck, et firent face aux archers, qui n’étaient guère plus nombreux, « Sanglier ! Sanglier ! » s’écria celui-ci en agitant sa massue. « Holà ! très-nobles Écossais, qui de vous veut gagner une couronne de comte ? qui veut emporter la tête du Sanglier ? Vous semblez ambitionner cette faveur, jeune homme ; mais il faut gagner le prix ayant de mettre la main dessus. »

Quentin n’entendit ces paroles qu’imparfaitement, parce qu’elles furent étouffées par la visière du casque de de la Marck ; mais le mouvement qui les suivit bientôt ne put lui laisser aucun doute ; car, à peine avait-il eu le temps de crier à son oncle et à ses camarades de se tenir en arrière s’ils étaient de vrais gentilshommes, que de la Marck s’élança sur lui avec le bond d’un tigre, faisant tournoyer sa massue de manière que, retombant au moment même où ses pieds toucheraient la terre, le coup dont il menaçait son antagoniste fût assené avec toute sa force. Mais Durward, qui avait le pied aussi léger que l’œil vif, fit un saut de côté, et esquiva une atteinte qui menaçait de lui être si funeste.

Ils s’abordèrent alors, comme le loup et le chien du berger, leurs compagnons restant de chaque côté spectateurs oisifs du combat ; car le Balafré, saisi d’admiration devant un si beau spectacle, criait de toutes ses forces : « Laissez-les faire ! laissez-les faire ! Mon neveu en viendra bien à bout, car, par ma foi ! il a toute la valeur de Wallace[1] ! »

  1. Un des plus illustres champions de la nationalité écossaises. Voyez l’Histoire d’Écosse, par sir Walter Scott. a. m.