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daient guère avec sa méfiance habituelle et son caractère ombrageux. Enfin, il était tellement passionné pour ce genre de galanterie qui règne seulement dans les derniers rangs de la société, qu’il fit faire d’un grand nombre d’anecdotes, pour la plupart très licencieuses, un recueil bien connu des bibliomanes, aux yeux de qui, et l’ouvrage n’est pas fait pour d’autres, la bonne édition est extrêmement précieuse.

Ce fut par le moyen du caractère énergique et prudent, quoique nullement aimable, de ce monarque, qu’il plut au ciel, qui fait servir à ses desseins la tempête comme la pluie la plus douce, de rendre à la grande nation française les bienfaits d’un gouvernement civil qu’elle avait presque totalement perdu à l’époque de son avènement au trône.

Avant de succéder à son père, Louis avait donné des preuves de vices plutôt que de talents. Sa première femme, Marguerite d’Écosse, avait succombé sous les traits de la calomnie dans la cour de son époux, sans quelque encouragement duquel personne n’eût osé prononcer un seul mot injurieux contre cette aimable princesse. Il avait été fils ingrat et rebelle, tantôt conspirant pour s’emparer de la personne de son père, tantôt lui faisant une guerre ouverte. En punition de ce premier crime, il avait été exilé dans le Dauphiné, qui était son apanage, et qu’il gouverna avec beaucoup de prudence ; le second fut puni d’un exil absolu, qui le força de recourir à la merci et presqu’à la charité du duc de Bourgogne et de son fils, à la cour desquels il jouit, jusqu’à la mort de son père, arrivée en 1461, d’une hospitalité qui dans la suite fut assez mal récompensée.

Dès le commencement de son règne, Louis fut au moment de succomber sous les efforts d’une ligue formée contre lui par les grands vassaux de sa couronne, à la tête de laquelle était le duc de Bourgogne, ou pour mieux dire son fils, le comte de Charolais. Ils levèrent une puissante armée, bloquèrent Paris, livrèrent sous les murs même de cette ville une bataille dont le résultat, quoique douteux, mit la monarchie française à deux doigts de sa perte. Il arrive ordinairement en pareilles circonstances que le plus politique des deux généraux recueille le fruit, sinon l’honneur de la bataille. Louis, qui avait montré beaucoup de bravoure personnelle à la journée de Montlhéry, sut par sa prudence profiter de cet événement indécis, comme si la victoire lui était restée. Il temporisa jusqu’à ce que ses ennemis eussent rompu