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plus encore que votre déplaisir, puisqu’elle me force de… — Par saint Georges de Bourgogne ! s’écria le duc, nos volontés seront-elles sans cesse contrariées, et nos ordres toujours combattus ? Relevez-vous, vous dis-je, ma mignonne, et retirez-vous pour le moment. Quand nous aurons le loisir de nous occuper de vous, nous nous y prendrons de telle sorte que, tête-saint-gris, il faudra que vous nous obéissiez, sinon… »

Malgré cette réponse sévère, Isabelle restait à ses pieds, et son opiniâtreté lui aurait probablement attiré des paroles plus dures encore, si la comtesse de Crèvecœur, qui connaissait l’humeur du prince beaucoup mieux que sa jeune amie, ne se fût empressée de la relever et de l’entraîner hors de la salle.

On fit alors comparaître Quentin Durward. Il se présenta devant le roi et le duc avec cette assurance également éloignée de la présomption et de la timidité convenable chez un jeune homme bien né et bien élevé, qui sait rendre honneur à qui il est dû, mais sans se laisser éblouir ni troubler par la présence de ceux qu’il doit honorer. Son oncle lui avait fourni les moyens de paraître avec les armes et sous l’uniforme d’archer de la garde écossaise ; et son maintien, sa fraîcheur, sa bonne mine, répondaient parfaitement à ce brillant costume. Sa grande jeunesse disposa d’avance les conseillers en sa faveur, car personne ne pouvait se persuader que le roi Louis, dont la prudence était extrême, eût choisi un aussi jeune homme pour confident de ses intrigues politiques. C’était ainsi que le roi, dans cette circonstance comme dans beaucoup d’autres semblables, tirait de grands avantages du choix singulier qu’il faisait de ses agents dans un âge et dans un rang où il semblait également invraisemblable qu’il pût les prendre. D’après l’ordre du duc, sanctionné par celui de Louis, Quentin se mit à faire la narration de son voyage avec les dames de Croye jusqu’aux environs de Liège, en commençant par rendre compte des instructions qu’il avait reçues du roi Louis, et qui lui enjoignaient de les escorter fidèlement jusqu’au château de l’évêque.

« Et vous avez rempli scrupuleusement mes ordres ? dit le roi. — Oui, Sire, répliqua l’Écossais. — Vous omettez une circonstance, dit le duc ; vous avez été attaqué non loin du Plessis, par deux chevaliers errants. — Il me conviendrait peu de rappeler un pareil incident, » répondit le jeune archer, en rougissant avec modestie. — « Mais il ne conviendrait pas que je l’oubliasse, moi, dit le duc d’Orléans. Ce jeune homme a rempli sa mission en homme