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solation ; « c’était autrefois ici la galerie de tableaux ; et dans le boudoir qui vient après, et qui est maintenant occupé par la bibliothèque, nous conservions quelques tableaux précieux de chevalet, dont la petite dimension exigeait qu’on les regardât de plus près. »

En parlant ainsi il écarta un pan de la tapisserie déjà citée, et nous entrâmes dans la chambre dont il venait de parler.

C’était une salle octogone, correspondant à la forme extérieure de la tourelle dont elle occupait l’intérieur. Quatre des côtés avaient des fenêtres garnies de jalousies, dont chacune offrait un point de vue magnifique et varié de la Loire et de la contrée adjacente à travers laquelle ce fleuve majestueux déroule ses vastes replis. Les croisées étaient garnies de vitraux peints, au travers desquels l’éclat du soleil couchant montrait un assemblage d’emblèmes religieux et d’armoiries qu’il était presque impossible de regarder sans être ébloui ; mais les deux autres, que les rayons de cet astre n’éclairaient plus, pouvaient être examinées avec plus d’attention, et l’on voyait facilement qu’elles étaient aussi en verre peint qui ne leur avait pas été destiné dès l’origine, mais qui, comme je l’appris ensuite, avait appartenu à la chapelle du château, aujourd’hui profanée et pillée. Pendant plusieurs mois le marquis s’était fait un amusement d’accomplir ce rifacimento avec l’aide du curé et de l’universel la Jeunesse ; et quoiqu’ils n’eussent fait que réunir des fragments souvent fort petits, ces vitraux peints, à moins qu’on ne les examinât de près et avec l’œil de l’antiquaire, produisaient dans leur ensemble un effet assez agréable.

Les côtés de l’appartement qui n’avaient pas de fenêtres étaient, à l’exception de l’espace nécessaire pour la petite porte, garnis d’armoires et de rayons, les uns en bois de noyer parfaitement sculpté, et auquel le temps avait donné une couleur brun-foncé, à peu près comme celle d’une châtaigne mûre ; les autres en bois de sapin ordinaire, réparations de fraîche date, destinées à suppléer au déficit occasionné par la violence et la dévastation. Sur ces rayons étaient déposés les débris ou plutôt les précieux restes d’une magnifique bibliothèque.

Le père du marquis avait été un homme instruit, et son grand-père, par l’étendue de ses connaissances, s’était rendu célèbre, même à la cour de Louis XIV, où la littérature était, jusqu’à un certain point, considérée comme un objet à la mode. Ces deux seigneurs, qui avaient joui d’une fortune considérable, et qui s’é-