Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/289

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taire pouvait avoir le moyen de protéger sa retraite. Il l’aida à se remettre sur ses pieds, et lui demanda s’il était blessé.

— « Je ne suis pas blessé, du moins je ne le pense pas, répondit le bourgeois ; mais je n’en puis plus. — Asseyez-vous donc sur cette pierre, et reprenez haleine ; je reviendrai dans un moment. — Quel parti suivez-vous ? » dit le bourgeois le retenant encore. — Celui de la France, celui de la France, » répondit Quentin cherchant à s’en aller. — « Eh ! mais, c’est mon aimable et jeune archer ? s’écria le digne syndic. Puisque mon heureux destin m’a fait rencontrer un ami dans cette effroyable nuit, je vous jure que je ne le quitterai pas. Allez partout où bon vous semblera, je vous accompagnerai ; et si j’attrape quelques braves garçons de ma corporation, je pourrai vous servir à mon tour ; mais ils sont dispersés çà et là, comme une mesure de pois renversée. Oh ! quelle terrible nuit ! »

Tout en parlant ainsi, il s’était emparé du bras de Quentin, qui, sentant de quelle importance pouvait être l’appui d’un personnage si influent, ralentit son pas afin qu’il pût le suivre, tout en maudissant au fond du cœur l’obstacle que cette compagnie apportait à la rapidité de sa marche.

Au haut de l’escalier était une antichambre dans laquelle des boîtes et des malles portaient les marques d’un récent pillage, car une partie de ce qu’elles avaient contenu était dispersée sur le plancher ; une lampe presque éteinte, posée sur la cheminée, répandait sa lueur mourante sur le corps d’un homme mort, ou privé de tout sentiment, qui gisait devant le foyer.

Dégageant son bras de celui de Pavillon, par une violente secousse qui faillit renverser celui-ci, et semblable à un lévrier qui entraîne avec lui la laisse par laquelle son gardien le retenait, Quentin s’élança dans une seconde chambre, puis dans une troisième qui paraissait être la chambre à coucher des dames de Croye. Il ne s’y trouvait aucune créature vivante. Il appela Isabelle, d’abord à voix basse, ensuite plus haut, puis enfin avec l’accent du plus violent désespoir : point de réponse. Il se tordait les mains, s’arrachait les cheveux, frappait la terre avec fureur, lorsqu’une faible lueur, qui brillait à travers les fentes de la boiserie dans un coin obscur de la chambre, lui fit conjecturer que la tapisserie cachait l’entrée de quelque réduit secret. Il l’examina avec autant de soin que de promptitude, et découvrit en effet une porte secrète, mais elle résista aux efforts réitérés qu’il fit pour