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dant la nuit pour s’entretenir secrètement avec eux dans la maison de Ronslaer, située près de la porte qui faisait face au château de Schonwaldt. Quentin n’hésita pas à leur dire qu’il résidait pour le moment dans le palais de l’évêque, sous prétexte de lui porter des dépêches de la cour de France, tandis que sa mission réelle, comme ils l’avaient conjecturé, était toute particulière aux citoyens de Liège. Cette manière tortueuse d’établir des communications, le rang et le caractère de l’individu auquel le message était confié, étaient si conformes au caractère de Louis, qu’il ne s’éleva ni doute ni surprise.

À peine cet éclaircissement était-il terminé que la foule arriva devant la porte de la maison de Pavillon, située dans l’une des principales rues, et qui communiquait à la Meuse par derrière, au moyen d’un jardin et d’une tannerie immense, avec toutes ses dépendances ; car le bourgeois patriote était tanneur et corroyeur.

Il était naturel que Pavillon désirât faire les honneurs de sa maison à l’envoyé supposé de Louis XI, et une halte chez lui n’excita nulle surprise de la part de la multitude, qui au contraire applaudit mein herr Pavillon par un bruyant vivat ! au moment où il y introduisait un hôte si honorable. Sans perdre de temps, Quentin, remplaça son bonnet trop remarquable par un chapeau de tanneur, et jeta un grand manteau par-dessus ses vêtements. Pavillon lui remit ensuite un passe-port au moyen duquel toutes les portes de la ville lui seraient ouvertes, soit de nuit soit de jour, comme il le jugerait à propos et termina en le confiant aux soins de sa fille, jeune et joyeuse Flamande, à laquelle il donna toutes les instructions nécessaires pour la sécurité du jeune homme. Pavillon courut ensuite rejoindre son collègue dans l’intention de conduire leurs amis à l’Hôtel-de-Ville, et de les y amuser par les meilleures excuses qu’il pourrait imaginer relativement à la disparition de l’envoyé du roi Louis.

Nous ne pouvons, comme dit le valet de la comédie, nous souvenir exactement de l’espèce de mensonge que les moutons à clochettes tirent au reste du troupeau, mais nous osons dire que rien n’est plus facile que d’en imposer à une multitude dont les préjugés et les sentiments impétueux ont déjà fait plus de la moitié du chemin avant que l’imposteur ait prononcé un seul mot.

Le digne bourgeois ne fut pas plus tôt parti, que la grosse et fraîche Trudchen, le visage couvert d’un riche incarnat auquel se joignait un sourire qui convenait admirablement à des lèvres ver-