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Balthasar (noms que l’église catholique a donnés aux mages qui vinrent de l’Orient apporter leurs offrandes à Bethléem) s’étaient arrêtés lorsqu’on les transportait à Cologne, et où elles ont opéré une multitude de miracles.

Quentin répliqua que les dames avaient formé la résolution de s’arrêter à toutes les saintes stations, et qu’elles ne manqueraient certainement pas de visiter celle de la Croix, en se rendant à Cologne, ou en en revenant, mais qu’on leur avait rapporté que la rive droite de la rivière était fort dangereuse, à cause des soldats du terrible Guillaume de la Marck.

— « Le ciel nous préserve, dit le frère François, que le Sanglier des Ardennes ait encore établi sa bauge si près de nous ! Et cependant, si cela devait être, la largeur de la Meuse serait une bonne barrière entre lui et nous. — Mais elle ne sera pas une barrière entre ces dames et ce maraudeur, si nous la traversons pour suivre la rive droite, répondit Quentin. — Le ciel protégera ses enfants, jeune homme, car il serait bien douloureux de penser que les Rois de la bienheureuse ville de Cologne, qui ne permettent pas qu’un Juif ou qu’un infidèle pénètre dans l’intérieur de la ville, pussent oublier assez les fidèles pèlerins qui viennent visiter et adorer leurs reliques, pour souffrir qu’ils fussent pillés et maltraités par un chien de mécréant tel que ce Sanglier des Ardennes, qui est plus infâme que tout un camp de païens sarrasins et les dix tribus d’Israël par-dessus le marché. »

Quelque confiance que Quentin, en qualité de bon catholique, fût porté à avoir dans la protection spéciale de Melchior, de Gaspard et de Balthasar, il pensa tout naturellement que les dames de Croye n’ayant pris le costume de pèlerines que par pure politique terrestre, on ne pouvait guère se flatter d’obtenir leur appui dans la circonstance présente : en conséquence il prit la sage résolution d’éviter, autant que possible, que ces dames eussent besoin d’une entremise miraculeuse. Mais en même temps, dans la simplicité de sa bonne foi, il fit vœu d’entreprendre lui-même un pèlerinage aux Trois Rois de Cologne, si ces très-discrets, très-nobles et très-saints personnages permettaient que celles qu’il escortait arrivassent heureusement au but secret de leur voyage.

Afin de prendre cet engagement avec plus de solennité, il pria le frère François de le conduire dans une des chapelles latérales de l’église ; et là, se jetant à genoux avec une sincère dévotion, il renouvela le vœu qu’il avait fait intérieurement. Le son des voix