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maîtresse. Il comprit aisément que lady Peveril était l’amie sûre à qui Bridgenorth avait définitivement confié la surveillance de sa fille, et sa seule inquiétude était de savoir ce que ferait et dirait son père lorsqu’il apprendrait de qui elle était réellement la fille. Il eut néanmoins le bon esprit de ne pas permettre que ces prévisions troublassent la joie de sa situation actuelle, pendant laquelle plusieurs signaux de reconnaissance, presque imperceptibles, mais remplis de charme pour les deux amants, s’échangèrent sous les yeux de lady Peveril, sans qu’elle y trouvât à redire, et à la faveur de la gaieté bruyante du vieux baronnet, qui parlait pour deux, mangeait pour quatre, et buvait pour six. Il aurait peut-être poussé un peu trop loin cette dernière occupation, s’il n’eût été interrompu par la personne qui lui apporta l’ordre du roi de se rendre incontinent auprès de Sa Majesté à White-Hall, et d’amener son fils avec lui.

Lady Peveril fut alarmée, et Alice pâlit, agitée de la même inquiétude ; mais le vieux chevalier qui ne voyait jamais au-delà de ce qui s’offrait naturellement à sa vue, attribua cet ordre au désir empressé du roi de le féliciter sur l’heureuse issue de son jugement ; intérêt de la part de Sa Majesté qu’il ne trouvait nullement extraordinaire, puisque lui-même payait si cordialement de retour cette bienveillance du souverain. Il se rappela, non sans une agréable surprise, qu’avant de quitter le tribunal, on lui avait donné à entendre qu’il serait prudent à lui de retourner à Martindale sans se présenter à la cour ; restriction qu’il jugeait aussi éloignée des sentiments du roi qu’elle l’était des siens propres.

Tandis qu’il se consultait avec Lance-Outram sur les moyens de nettoyer son ceinturon de buffle et la poignée de son sabre aussi promptement que la circonstance le permettait, lady Peveril put informer plus clairement Julien qu’Alice avait été mise sous sa protection par la volonté de son père, et avec le consentement de celui-ci à leur union, si elle pouvait avoir lieu. Elle ajouta qu’elle avait résolu d’employer la médiation de la comtesse de Derby pour surmonter les obstacles que l’on pouvait appréhender de la part de sir Geoffrey.



CHAPITRE XLIX.

CONCLUSION.


Au nom du roi, rengainez vos épées et vos poignards.
Sheridan. La Critique.


Quand le père et le fils entrèrent dans le cabinet du roi, il fut facile de s’apercevoir que sir Geoffrey avait obéi aux ordres du prince avec la même célérité que s’il eût été appelé par le son du boute-selle ; ses cheveux et ses vêtements en désordre, quoiqu’ils