Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/561

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de Votre Majesté ; suffit ? Je suivis ma charmante conductrice dans un appartement où se trouvaient réunis et bizarrement confondus des armes de guerre et des instruments de musique ; je vis entre autres objets celui qui m’a récemment servi d’asile momentané, la boîte à violoncelle. À ma grande surprise, ma protectrice passa derrière cette caisse, et l’ouvrant au moyen d’un ressort, me montra qu’elle était remplie de pistolets, de poignards, et de munitions attachés à des bandoulières. « Ces armes, me dit-elle, sont destinées à surprendre cette nuit l’imprudent Charles dans son palais (Votre Majesté me pardonnera si je répète ses propres expressions) ; mais si tu oses te mettre à leur place, tu peux être le sauveur du roi et des trois royaumes ; si au contraire tu as peur, garde le secret, je tenterai moi-même l’aventure… À Dieu ne plaise, répondis-je, que Geoffrey Hudson soit assez lâche pour vous laisser courir un tel risque. Vous ne savez pas, vous ne pouvez pas savoir comment il se faut comporter dans de semblables cachettes ; moi j’y suis habitué : j’ai été caché dans la poche d’un géant ; j’ai formé le contenu d’un pâté… Entre donc, répliqua-t-elle, et sans perdre de temps. » Cependant je ne nierai pas que, tandis que je me préparais à obéir, certaines craintes vinrent refroidir mon bouillant courage, et je lui avouai que, si faire se pouvait, j’aimerais tout autant me rendre au palais en faisant usage de mes jambes. Mais elle ne voulut pas m’écouter, et me répondit vivement que je serais arrêté si on me voyait sortir, ou qu’on ne me laisserait pas entrer au palais ; que je devais prendre le moyen qu’elle m’offrait pour parvenir jusqu’à vous, sire ; enfin que j’eusse à vous avertir d’être sur vos gardes, que cela suffirait sans doute, car une fois que la conspiration est découverte, les conspirateurs n’étaient plus guère à craindre. Ne consultant donc que mon courage, je dis hardiment adieu à la lumière du jour qui était alors sur son déclin ; aussitôt mon guide, retirant de la boîte les objets qu’elle contenait, les cacha derrière le châssis qui fermait la cheminée, et m’introduisit à leur place. Comme elle refermait l’étui, je la suppliai de recommander aux hommes à qui l’on me confierait de prendre garde à tenir le manche du violoncelle en haut ; mais je n’avais pas achevé ma prière que je me trouvai seul et dans les ténèbres. Bientôt après entrèrent deux ou trois individus, qu’à leur langage, dont je comprenais quelque chose, je reconnus pour être des Allemands au service du duc de Buckingham… J’entendis les ins-