Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/544

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presque aussitôt, sans qu’il en résultât aucune des conséquences que Buckingham en attendait.

Enfin et lorsque la soirée s’avançait, Jerningham annonça M. Chiffinch venant de la cour, et ce digne personnage entra presque en même temps.

« D’étranges choses sont arrivées, milord duc, dit-il à Buckingham, Sa Majesté vous prie de passer tout de suite au palais. — Vous m’alarmez, » répliqua Buckingham en se levant. « J’espère pourtant qu’il n’est rien arrivé de fâcheux ; j’espère que Sa Majesté se porte bien. — Parfaitement bien ; elle désire voir Votre Grâce à l’instant même. — L’ordre est subit. Vous voyez que je traite ce soir de joyeux amis, et que je ne suis guère en état de paraître devant le roi, Chiffinch. — Votre Grâce me paraît être en fort bon état pour se présenter, et vous savez que Sa Majesté ne manque pas d’indulgence. — C’est vrai, » répliqua le duc tourmenté d’inquiétude relativement au motif de cet ordre inattendu ; « c’est vrai. Sa Majesté est fort indulgente ; je vais demander ma voiture. — La mienne est en bas ; si Votre Grâce veut bien s’en servir. »

Privé de tout moyen d’évasion, Buckingham prit sur la table un verre qu’il but, et pria ses amis de rester dans son hôtel aussi long-temps qu’ils pourraient s’y amuser. Il espérait, leur dit-il, pouvoir revenir presque immédiatement ; sinon, il prendrait congé d’eux avec son toast accoutumé : « Puissent tous ceux de nous qui ne seront pas pendus dans l’intervalle se retrouver encore ici le premier lundi du mois prochain ! »

Ce toast ordinaire du duc avait rapport au caractère de plusieurs des personnes qu’il recevait ; mais il ne le porta point cette fois sans réfléchir à son propre destin, dans le cas où Christian l’aurait trahi. Il se hâta d’ajouter quelque chose à sa toilette, et monta dans la voiture de Chiffinch pour se rendre à White-Hall.