Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/451

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de faire connaître le démon nocturne qui ne venait lui ravir ses heures de sommeil que pour ajouter un nouveau fiel à l’amertume qui l’abreuvait, et verser du poison sur des blessures qui déjà lui causaient une si vive douleur. Il avait peu de moyens de se venger ; mais, dans sa colère, il était décidé à faire usage de tous ceux qui lui restaient. Il se promit bien de faire un examen plus sévère et plus attentif de toute sa cellule, afin de découvrir l’issue par laquelle entrait le tourmentant visiteur, fût-elle aussi imperceptible que le trou d’une tarière. Si les perquisitions étaient infructueuses, il se déterminerait à informer le geôlier, qui ne pourrait pas apprendre avec indifférence que sa prison s’ouvrait pour de tels intrus. Il résolut aussi de chercher à voir dans les regards de cet homme s’il était instruit de ces visites ; et, dans ce cas, le dénoncer aux magistrats, aux tribunaux, à la chambre des communes même, était la plus douce des représailles que lui suggéraient ses ressentiments. Le sommeil vint surprendre son corps fatigué, au milieu de ces projets de recherche et de vengeance ; et comme il arrive souvent, la lumière du jour le ramena à des résolutions moins violentes.

Il réfléchit alors qu’il n’avait aucune raison de regarder les motifs de son visiteur comme tout-à-fait malveillants, quoique celui-ci ne l’eût guère encouragé à concevoir l’espérance qu’il en obtiendrait des secours pour ce qu’il avait le plus à cœur. À son égard, l’être invisible avait témoigné un sentiment non équivoque de sympathie et d’intérêt. Si, grâce à ses bonnes dispositions, il parvenait à sortir de captivité, il pourrait, une fois libre, s’occuper de secourir ceux au bonheur desquels il s’intéressait plus qu’au sien propre. « Je me suis conduit comme un fou, dit-il ; j’aurais dû temporiser avec cet être singulier, apprendre les motifs de son intervention, et profiter de sa bienveillance, pourvu que j’eusse pu le faire sans me soumettre à des conditions déshonorantes, conditions que j’aurais toujours été à temps de rejeter si elles m’avaient été proposées. »

En parlant ainsi, il prenait la résolution d’agir avec plus de prudence dans ses relations avec l’étranger, en cas qu’ils communiquassent encore ensemble, lorsque ses méditations furent interrompues par sir Geoffrey Hudson qui, s’étant chargé la veille des soins domestiques de leur habitation commune, lui fit l’invitation péremptoire de vouloir bien s’en acquitter à son tour.

Il était impossible de se refuser à une sommation si raisonnable.