Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/420

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d’une voix unanime, déclarèrent que, sans leur intervention prompte et vigoureuse, on ne pouvait savoir quel mal n’eût pas fait une personne aussi dangereuse que le prisonnier. L’opinion générale qu’il voulait procéder à son élargissement par des voies de fait sembla dès lors si profondément imprimée dans l’esprit des spectateurs, que Julien vit qu’il était inutile de présenter la moindre défense ; il sentait d’ailleurs trop bien que les suites alarmantes et probablement fatales de sa rencontre rendaient son emprisonnement inévitable. Il se contenta de demander dans quelle prison il allait être jeté ; et quand le formidable mot Newgate lui fut renvoyé pour toute réponse, il eut du moins la satisfaction de penser que, si triste et si dangereux que fût un tel séjour, il s’y trouverait en compagnie de son père ; et que de façon ou d’autre, ils auraient peut-être la consolation de se voir, et de déplorer ensemble les calamités qui semblaient fondre de toutes parts sur leur maison.

S’armant par nécessité de plus de patience qu’il n’en avait réellement, Julien donna au juge, avec lequel toute la douceur de sa conduite ne put cependant pas le réconcilier, l’adresse de la maison où il demeurait, en le priant de permettre que son domestique, Lance-Outram, lui apportât son argent et son linge, ajoutant qu’il consentait volontiers à mettre à la disposition du magistrat ses armes et ses papiers, les unes consistant en une paire de pistolets de voyage, et les autres en quelques notes insignifiantes. Il pensa dans ce moment, avec une vive satisfaction, que les importantes dépêches de lady Derby étaient déjà au pouvoir du souverain.

Le juge promit d’avoir égard à sa requête, non sans lui dire avec beaucoup de dignité, qu’il aurait dû, dans son propre intérêt, adopter dès le commencement cette conduite respectueuse et soumise, au lieu d’insulter à la présence d’un magistrat par ces marques atroces du pervers, rebelle et sanguinaire esprit de papisme qu’il avait d’abord fait paraître. « Cependant, ajouta-t-il, comme vous êtes un jeune homme de bonne mine et d’un rang honorable, je ne souffrirai pas qu’on vous mène par les rues comme un voleur, et j’ai fait demander une voiture pour vous. »

Sa Seigneurie Maulstatute prononça le mot de voiture avec l’importance d’un homme qui, comme l’a dit le docteur Johnson à une époque moins reculée, sent tout l’avantage qu’il y a de pouvoir faire mettre ses chevaux à son carrosse. Le digne maître