Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/366

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sager de lord Saville ne puisse parvenir jusqu’à la duchesse avec les dépêches qui dévoileraient tout le mystère. »

Le duc alors parut alarmé, et sonna avec précipitation. Jerningham parut aussitôt. « Où est la lettre que j’ai reçue de M. Chiffinch il y a quelques heures ? lui demanda-t-il. — Si elle n’est pas parmi celles que Votre Grâce a devant elle, je n’en sais rien, répondit Jerningham : je n’en ai pas vu arriver d’autres. — Tu mens, drôle, dit Buckingham ; qui t’a permis d’avoir une mémoire meilleure que la mienne ? — Si Votre Grâce veut me permettre de le lui rappeler, elle se souviendra qu’elle a à peine ouvert une lettre cette semaine, dit Jerningham. — A-t-on jamais vu un maraud plus impatientant ? reprit le duc ; il pourrait jouer le rôle de témoin dans la conspiration. Le voilà qui a détruit entièrement ma réputation d’exactitude par sa diable de déposition. — Du moins les talents et la capacité de Votre Grâce resteront intacts, dit Christian, et vous pourrez les employer utilement pour vous-même et pour vos amis. Si j’ose vous donner mon avis, vous irez immédiatement à la cour, et vous y préparerez l’impression que nous désirons faire. Si Votre Grâce peut lancer quelques mots de manière à contrecarrer Saville, ce sera à merveille. Mais occupez surtout l’oreille du roi : personne ne peut le faire mieux que vous. Laissez Chiffinch remplir son cœur d’un objet convenable. Autre chose encore. Il y a un ancien lourdaud de cavalier qui infailliblement intriguerait pour la comtesse de Derby… On le suit de près, et toute la bande des témoins est sur sa piste. — Eh bien ! attrape-le, Topham. — Topham l’a déjà arrêté, milord, dit Christian ; mais il y a de plus un jeune galant, fils dudit cavalier, qui a été élevé dans la famille de la comtesse de Derby, et qui a été chargé par elle de lettres adressées au provincial des jésuites et à d’autres personnes de Londres. — Quels sont leurs noms ? » dit sèchement le duc.

« Sir Geoffrey Peveril de Martindale-Castle, dans le Derbyshire, et son fils Julien. — Quoi ! Peveril du Pic ? s’écria le duc ; un vieux cavalier aussi intrépide que quiconque a jamais prononcé un juron, un homme de Worcester, un brave que l’on trouvait partout quand il y avait des coups à donner ou à recevoir ! Je ne consentirai pas à sa perte, Christian. Il faut détourner votre meute à coups de fouets de ces fausses pistes… À coups de fouet, je dis bien ; car c’est tout ce qu’ils méritent, et c’est ce qu’ils auront si jamais la nation vient à ouvrir les yeux. — En attendant,