Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/224

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resta muet quelques instants, cherchant vainement une réponse convenable qui pût marquer son adhésion à ce qu’avait dit le major, et s’accorder en même temps avec l’honneur de sa famille et le respect qu’il devait à ses parents.

Ce silence éveilla les soupçons de Bridgenorth, son œil étincela, et ses lèvres tremblèrent.

« Jeune homme, lui dit-il, point de dissimulation, agissez franchement avec moi dans cette affaire, si vous ne voulez pas que je vous considère comme l’exécrable séducteur d’une jeune fille que vous auriez entraînée à sa perte au moyen d’une promesse que vous n’eûtes jamais dessein d’accomplir. Que je soupçonne seulement cette odieuse intention, et vous verrez si l’orgueil et la généalogie de votre famille vous sauveront de la juste vengeance d’un père. — Vous êtes injuste, dit Peveril, cruellement injuste, major Bridgenorth. Je suis incapable de l’infamie dont vous me soupçonnez. La proposition que j’ai faite à votre fille était aussi sincère que jamais homme puisse en faire à une femme. Si j’ai hésité à répondre, c’est parce que vous jugez nécessaire de m’examiner sévèrement, et que vous voulez connaître mes sentiments et mes projets dans toute leur étendue, sans me laisser entrevoir les vôtres. — Telle est donc votre proposition, dit Bridgenorth ; vous êtes disposé à conduire ma fille unique dans l’exil, loin de sa patrie, afin de lui donner un droit à la tendresse et à la protection d’une famille qui la méprisera, vous le savez ; vous êtes disposé à vous unir à elle de cette manière, à condition que je consentirai à joindre au don de sa main une fortune suffisante pour égaler celle que vos ancêtres possédaient à l’époque où ils avaient plus de raison d’être orgueilleux de leurs richesses. Ici, jeune homme, la balance ne me paraît pas égale. Et cependant, » continua-t-il, après un moment de réflexion, je mets si peu de prix aux biens de ce monde, qu’il ne serait pas entièrement hors de ton pouvoir d’obtenir mon consentement à ce mariage, quelque inégal qu’il puisse paraître. — Apprenez-moi quels sont les moyens d’obtenir votre faveur, major Bridgenorth, dit Peveril, car je ne puis douter qu’ils ne s’accordent parfaitement avec mon honneur et mon devoir, et vous verrez avec quelle ardeur je m’empresserai de suivre vos avis, et de me soumettre aux conditions que vous m’imposerez. — Ces moyens sont renfermés en peu de mots, répondit Bridgenorth : être honnête homme et bon patriote. — Personne n’a jamais douté, répliqua Peveril, que je