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monticules sur lesquels autrefois les tribus du Nord élisaient ou reconnaissaient leurs chefs, et où elles tenaient leurs assemblées populaires, appelées comices. On y voyait aussi une de ces tours bizarres, assez communes en Irlande pour être devenues le sujet favori des investigations des antiquaires de cette contrée, mais dont la destination véritable paraît encore cachée dans la nuit des siècles : celle d’Holm-Peel avait été transformée en tour d’observation. Il y avait encore des monuments runiques, dont les inscriptions étaient indéchiffrables, à l’exception de quelques-unes, plus récentes, consacrées à la mémoire de héros dont les noms seuls avaient été préservés de l’oubli. Mais la tradition et la vieillesse crédule, toujours empressées de parler lorsque l’histoire se tait, avaient suppléé à son silence par des contes de rois de la mer, de pirates, de chefs hébrides et de conquérants norwégiens, qui jadis avaient attaqué ou défendu ce château fameux. La superstition avait aussi ses contes de fées, d’esprits, de spectres, ses légendes de saints et de démons, de génies et d’esprits familiers : fables qui ne sont nulle part racontées et accueillies avec une crédulité aussi absolue que dans l’île de Man.

Au milieu de ces ruines des temps passés s’élevait le château, dont l’intérieur n’offrait que décombres, mais qui, sous le règne de Charles II, avait bonne garnison, et se trouvait encore, sous le rapport militaire, dans l’état le plus satisfaisant. Cet édifice, vénérable par son ancienneté, contenait divers appartements d’une hauteur et d’une grandeur suffisantes pour leur donner une apparence de noblesse ; mais lors de la reddition de l’île par Christian, l’ameublement en avait été en grande partie détruit ou pillé par les soldats de la république, de manière que son état actuel, comme nous l’avons déjà dit, le rendait peu propre à former la résidence de son noble propriétaire. Cependant il avait souvent été le séjour, non-seulement des seigneurs de Man, mais encore des prisonniers d’état que les rois de la Grande-Bretagne confiaient à leur garde.

Ce fut dans ce château d’Holm-Peel que Richard, comte de Warwick, surnommé le faiseur de rois, fut enfermé à une certaine époque de sa vie, fertile en événements, pour rêver à loisir à ses plans ambitieux. Ce fut là aussi qu’Éléonore, la femme hautaine du bon duc de Glocester, languit dans la réclusion pendant les derniers jours de son exil. Les sentinelles prétendaient que son ombre irritée se faisait voir la nuit à travers les créneaux des