Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/462

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que vous prenez un mauvais chemin, maître Jenkin, dit Richie. Eh mais, n’ayez pas peur, mon ami, vous voyez que vous êtes connu. Mon Dieu ! faut-il que le fils d’un honnête homme en soit venu à craindre de s’entendre appeler par son nom ? Jin Vin se frappait le front avec violence.

« Allons, allons, dit Richie, cette colère ne sert à rien. Dites-moi où vous allez ? — Au diable ! répondit Jin Vin. — Vous prenez là un chemin bien noir, si vous parlez à la lettre, répondit Richie ; mais si ce n’est qu’une métaphore, il y a dans cette grande ville de plus mauvais lieux que la taverne du diable, et j’irais assez volontiers avec vous pour vous régaler de quelques bouteilles de vin blanc brûlé, cela corrigera les crudités de mon estomac et le disposera tout doucement à manger une cuisse de poulet froid. — Je vous prie sérieusement de me laisser passer, dit Jin Vin. Vos intentions peuvent être bonnes et je ne vous souhaite pas de mal non plus ; mais je suis d’une humeur qui peut devenir dangereuse à moi-même et à tout autre. — J’en courrai le risque, répliqua l’Écossais, si vous voulez seulement venir avec moi. Voici un endroit convenable et un peu plus près que l’auberge du diable, qui est un nom de bien mauvaise augure pour une taverne. Celle de Saint-André est fort tranquille ; j’avais coutume d’aller m’y rafraîchir de temps en temps quand je demeurais dans le voisinage du Temple avec lord Glenvarloch. Mais que diable cet homme a-t-il pour sauter de cette manière ?… il a pensé m’entraîner avec lui sur le pavé ! — Ne nommez pas devant moi ce perfide Écossais, s’écria Jin Vin, si vous ne voulez pas me faire devenir fou. J’étais heureux avant de le connaître ; il est cause de tous les malheurs qui me sont arrivés ; il a fait de moi un fripon et un fou ! — Si vous êtes un fripon, dit Richie, vous avez rencontré un officier de police : si vous êtes fou, vous avez rencontré un gardien : mais un officier de police accommodant et un bon gardien. Tenez, mon ami, on raconte au sujet de ce même lord une foule de choses qui ne sont pas plus vraies que les mensonges de Mahomet ; tout le mal qu’on en peut dire, c’est qu’il n’est pas toujours disposé à recevoir les bons avis qu’on voudrait lui donner, et dont je désirerais qu’il profitât, ainsi que vous et tout jeune homme honnête. Venez avec moi, venez seulement avec moi, et si un peu d’argent et beaucoup de sages conseils peuvent vous être de quelque secours, tout ce que je puis dire, c’est que vous avez eu le bonheur de trouver en moi un