Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/395

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teinte à votre réputation. Quant à votre seconde erreur, je vous la rappellerai sans scrupule… Milord ! milord ! quels que fussent les torts de lord Dalgarno à votre égard, le fils d’un tel père aurait dû être un objet sacré pour vous. — Vous parlez de sang-froid, maître Heriot ; moi j’étais exaspéré par mille outrages dont il m’avait accablé sous le masque de l’amitié. — C’est-à-dire qu’il avait donné de mauvais conseils à Votre Seigneurie ; et que vous, milord… — Je fus assez fou pour les suivre, interrompit Nigel. Mais nous laisserons cela de côté, s’il vous plaît, Maître Heriot. Les gens d’un certain âge et les jeunes gens, les hommes d’épée et ceux qui se livrent à des professions paisibles, ont toujours pensé et penseront toujours différemment sur ce sujet. — Je conviens de cette différence d’opinions entre un jeune lord et un vieil orfèvre… Cependant vous auriez dû avoir plus de patience par égard pour lord Huntinglen, et plus de prudence dans votre propre intérêt, en supposant que votre querelle fût juste. — Je vous prie de vouloir bien passer à quelqu’autre accusation. — Je ne suis pas votre accusateur, milord ; mais j’espère que votre cœur vous a déjà reproché amèrement la manière outrageante dont vous avez violé les devoirs de l’hospitalité envers votre ancien hôte. — Si j’avais été coupable du crime dont vous parlez, si j’y avais été entraîné par un moment de tentation, le repentir le plus amer n’aurait pas tardé à le suivre… Mais je ne suis pas le séducteur de cette malheureuse femme… Il y a une heure, j’ignorais encore qu’elle se fût détournée de son devoir. — Allons donc, milord ! » dit Heriot avec un peu de sévérité, « ceci ressemble trop à de l’affectation. Je sais qu’il y a parmi la jeunesse de notre temps une nouvelle morale au sujet de l’adultère comme de l’homicide… J’aimerais mieux vous entendre parler de corriger le Décalogue, et d’y substituer des peines plus légères en faveur des ordres privilégiés ; je le préférerais, dis-je, à vous entendre nier un fait dont on sait que vous vous êtes glorifié. — M’en glorifier ! jamais ! Il était impossible que je pusse tirer vanité d’une chose semblable ; mais pouvais-je empêcher de jeunes écervelés à la langue légère de faire des suppositions ? — Vous auriez bien su leur fermer la bouche, milord, s’ils avaient dit de vous quelque chose qui eût choqué vos oreilles et qui n’eût pas été fondé sur la vérité. Allons, milord, rappelez-vous la promesse que vous m’avez faite d’être sincère : un aveu, en semblable cas, est déjà un commencement de réparation. Je conviendrai que