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dien de service regarda du guichet, et parla un moment tout bas avec l’écuyer. Quelques minutes après arriva le lieutenant de la Tour, qui reçut et délivra une reconnaissance portant qu’on avait remis entre ses mains la personne de Nigel, lord de Glenvarloch.



CHAPITRE XXVIII.

LA TOUR DE LONDRES.


Ô tour de Jules César, éternel opprobre de Londres, témoin de tant de meurtres affreux, commis à la faveur des ténèbres !
Gray.


Telle est l’exclamation de Gray. Long-temps avant lui, Bandello[1] avait dit quelque chose de semblable, et le même sentiment, quelque forme qu’il ait prise, doit s’être présenté souvent à ceux qui, se rappelant le sort des autres captifs de cette prison mémorable, n’avaient peut-être que trop de raisons de redouter un semblable destin. Cette voûte sombre et ténébreuse qui, comme les portes de l’Enfer du Dante, semblait interdire toute espérance à ceux qui entraient ; les sourds accents de la voix des gardiens se murmurant quelques paroles ; les petites formalités observées pour ouvrir et fermer le guichet ; le salut réservé et contraint du lieutenant de la forteresse, qui témoigna au prisonnier cette politesse froide et mesurée, tribut que l’autorité daigne payer au décorum, tout frappa le cœur de Nigel, et le pénétra du triste sentiment de sa captivité.

« Je suis prisonnier ! » dit-il, et ces mots lui échappaient presque à son insu ; « je suis prisonnier, et dans la Tour ! »

Le lieutenant s’inclina en ajoutant : « Et il est de mon devoir de montrer à Votre Seigneurie la chambre qu’elle doit occuper ; je suis forcé d’ajouter que mes ordres m’obligent à vous tenir dans une captivité assez sévère… Je l’adoucirai autant que mon devoir me le permettra. »

Nigel se contenta de s’incliner à son tour en réponse à ce compliment, et suivit le lieutenant dans les anciens bâtiments situés du côté occidental de la cour d’honneur et contigus à la chapelle ; bâtiments qui servaient dans ce temps de prison d’État, et qui du nôtre servent de réfectoire aux officiers de la garde tour à tour de service dans cette forteresse. Les doubles portes furent ou-

  1. Moine et chroniqueur italien du xvie siècle. a. m.