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accompagnant ces mots de la nomenclature de tous les articles dont ils tenaient un assortiment. Cet appel direct et personnel aux passants n’est plus maintenant en usage que dans la rue Montmouth (s’il existe même encore dans ce refuge des marchands de vieux habits, parmi les enfants de la race errante d’Israël) ; mais dans le temps dont nous parlons, c’était une coutume commune aux juifs et aux gentils, et qui remplaçait le charlatanisme des annonces de nos journaux : le but de tous ces moyens est d’attirer l’attention du public en général, et des amis en particulier, sur l’incomparable excellence des marchandises exposées en vente, à un prix si modique que les marchands semblent plutôt avoir en vue le service du public que leur avantage particulier. Ceux qui proclamaient verbalement l’excellence de leurs marchandises avaient un avantage sur ceux qui maintenant se servent des feuilles d’annonce, c’est qu’ils pouvaient, dans différentes circonstances, adapter adroitement leurs paroles à l’extérieur particulier et au goût des passants.

Ce dernier perfectionnement était aussi d’usage dans la rue Montmouth, comme nous le rappelons encore, et on nous a souvent fait apercevoir à nous-même ce qui pouvait manquer à notre costume, en nous exhortant à nous faire habiller plus convenablement ; mais ceci est une digression.

Ce mode d’invitation directe et personnelle aux chalands devenait cependant une tentation dangereuse pour les jeunes étourdis chargés d’attirer les pratiques en l’absence de la personne intéressée à la vente. Se fiant à leur nombre et à leur esprit de corps, les apprentis et commis-marchands de Londres se permettaient souvent des libertés avec les passants, et exerçaient leur esprit aux dépens de ceux qu’ils n’avaient aucun espoir de convertir en acheteurs par leur éloquence. Si ces sarcasmes leur attiraient quelques violentes représailles, tous les autres garçons de boutique étaient prêts à venir au secours de leurs confrères, comme le dit une vieille chanson que le docteur Johnson avait coutume de fredonner :


Et de Londres, grands et petits,
Se levaient tous les apprentis.


Des combats acharnés s’engageaient souvent à ces occasions, surtout quand les étudiants en droit[1] ou autres jeunes gens ap-

  1. Les Templiers dit le texte, parce que les gens de loi occupent le local où demeurèrent les chevaliers du Temple. a. m.