Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/316

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c’est se vouloir noyer avec deux sous de Malvoisie. En vérité, vous m’auriez appris votre secret en ce moment, si je ne m’en étais déjà bien douté… Vous saurez donc, monsieur Nigel, puisque Nigel est à l’ordre du jour, que je ne vous ai appelé milord, que parce que nous vous avons fait pair d’Alsace hier au soir, lorsque le vin nous eut mis de bonne humeur… Quelle mine vous faites, maintenant !… Ha, ha, ha ! »

Nigel, sentant effectivement qu’il s’était trahi sans nécessité, se hâta de répondre qu’il le remerciait beaucoup des honneurs qu’il lui avait conférés, mais qu’il ne se proposait pas de rester assez long-temps dans le sanctuaire pour en jouir.

« Ma foi, quant à cela, ce sera comme vous voudrez, si vous voulez suivre un bon conseil, » répondit le duc. Et quoique Nigel restât debout, dans l’espoir de hâter le départ de son visiteur, celui-ci se jeta sur un des vieux fauteuils de tapisserie, qui gémit sous son poids, et se mit à appeler le vieux Traphois. La femme de ménage ayant paru au lieu de son maître, le duc la maudit et la traita de la manière la plus injurieuse, pour avoir négligé d’apporter le coup du matin à un étranger et à un hôte aussi estimable que M. Grahame.

« Je ne le prends jamais, monsieur, répondit Glenvarloch. — Il y a commencement à tout, répondit le duc. Allez, vieux rebut de Satan, allez au palais y chercher le coup du matin pour lord Green… Voyons, que sera-ce, milord ? un pot de double ale mousseuse avec une pomme sauvage dansant dessus comme un bouchon sur l’eau, ou bien, voyons, oui, oui, les jeunes gens sont friands, un litre de vin brûlé avec du sucre et des épices… c’est excellent contre les brouillards… ou plutôt, n’aimez-vous pas mieux un verre d’eau distillée ? Allons, nous aurons tout cela, et vous pourrez choisir ensuite… Ici, vieille Jésabel ! dites à Teni d’envoyer l’ale, le vin de Canaries, et l’eau distillée, avec un morceau de gâteau ou quelque chose de ce genre, et de le porter en compte au nouveau venu. » Glenvarloch, pensant qu’il valait encore mieux supporter un moment l’insolence de cet homme que de s’attirer une seconde querelle avec des individus de la sorte, le laissa faire sans l’interrompre, lui disant seulement : « Vous vous mettez à votre aise chez moi, monsieur ; mais pour le moment vous pouvez en agir comme il vous plaira. Cependant je voudrais bien savoir ce qui m’a procuré l’honneur de cette visite inattendue. — Vous le saurez quand la vieille Deborah aura apporté