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quelques bons avis dictés par la connaissance qu’avait Lowestoffe de l’Alsace et de ses coutumes. Il conseillait au jeune lord de laisser l’usurier dans une incertitude complète sur l’état de ses fonds, de ne jamais s’engager dans une partie avec le capitaine, qui avait l’habitude de jouer serré et de payer, quand il perdait, avec trois voyelles[1] ; et enfin de se méfier du duc Hildebrod, qui était, ajoutait-il, aussi fin qu’une aiguille, quoique, semblable à cet instrument de l’industrie féminine, il n’eût aussi qu’un œil.



CHAPITRE XVIII.

ÉCLAIRCISSEMENTS D’UN MYSTÈRE.


La mère. Quoi ! vous vous êtes laissé éblouir par l’éclat du miroir de Cupidon ; l’enfant espiègle se plaît à frapper les yeux des passants des rayons du soleil, et rit ensuite de les voir tomber… La fille. Non, ma mère ; c’est l’éclair qui m’a frappée, et jamais mes yeux ne reverront la lumière comme auparavant.
Bœuf et Pouding, vieille comédie.


Il faut que nous laissions un moment notre héros Nigel, quoique dans une situation peu sûre, peu commode et peu honorable, pour entrer dans quelques détails nécessaires pour l’intelligence de ses aventures.

Il y avait trois jours que lord Nigel s’était retiré dans la maison du vieux Traphois, le fameux usurier de White-Friars, appelé généralement Traphois-le-Doré. La jolie fille du vieil horloger Ramsay, après avoir pieusement vu déjeuner son père, et veillé à ce que, dans un instant de distraction, il ne prît pas la salière pour une croûte de pain, le laissa retomber dans la profondeur de ses combinaisons, et sortit accompagnée de sa vieille et fidèle Jeanet l’Écossaise, pour qui ses caprices étaient des lois. Elle prit la route de Lombard-Street, et se rendit, dès huit heures, chez la tante Judith, sœur de son digne parrain.

La respectable demoiselle ne lui fit pas l’accueil le plus gracieux ; car elle ne partageait pas, ce qui ne doit pas beaucoup étonner, l’extrême admiration de maître Heriot pour la jolie figure de mistress Marguerite, ni sa complaisance pour la pétu-

  1. Three vowels, dit le texte ; ce qui signifie bien trois voyelles, mais n’en a pas moins besoin d’explication : Quand un joueur perd et n’a pas de quoi payer, comme un billet pour dette de jeu n’est pas reconnu par la loi anglaise, le perdant, qui veut donner un titre au gagnant, lui remet un papier sur lequel il écrit les trois voyelles I. O. Y, qui veulent dire, I owe youJe vous dois tant ; cela constitue une dette d’honneur. a. m.