Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/230

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personne d’un pair est sacrée, et par conséquent à l’abri des arrestations ; et s’il s’agit d’un manque de moyens pécuniaires, je vous assure, milord, qu’on se tire d’affaire partout ailleurs beaucoup mieux que là, où les habitants sont si misérables qu’ils se dévorent les uns les autres. — Mes embarras ne naissent pas du manque d’argent, répondit Nigel. — Hé bien donc, je suppose, milord, que vous vous êtes battu, et que vous avez tué votre homme ; auquel cas, avec une bourse passablement fournie, vous pouvez rester perdu dans White-Friars pendant un an. À la vérité, il faut vous faire recevoir membre d’une très-honorable société, milord, et vous faire admettre aux privilèges des bourgeois d’Alsace ; sans quoi, milord, il n’y aurait pour vous ni paix ni sûreté. — Ma faute n’est pas tout à fait aussi terrible que vous le supposez, maître Lowestoffe, répondit lord Glenvarloch ; j’ai frappé un gentilhomme dans le parc, et voilà tout. — De par ma main, milord, vous auriez mieux fait de lui passer votre épée au travers du corps à Barns-Elms ! s’écria l’étudiant en droit. Frapper dans l’enceinte de la cour ! Vous verrez que vous vous êtes attiré là une terrible affaire, milord ; surtout si votre adversaire et un homme de rang et en crédit à la cour. — Puisque j’ai déjà tant fait, je ne vous déguiserai rien, maître Lowestoffe, dit Nigel ; la personne que j’ai frappée est lord Dalgarno, que vous avez vu chez Beaujeu. — Le compagnon, le favori du duc de Buckingham ! c’est un cas des plus fâcheux, milord ; mais j’ai le cœur anglais, et ne puis souffrir de voir un jeune seigneur dans la position dont vous êtes menacé. Nous causons ici beaucoup trop publiquement pour la situation de vos affaires. Les étudiants du Temple ne souffriraient pas qu’un huissier exécutât un mandat d’arrêt, ou qu’un gentilhomme fût arrêté pour un duel dans leur enceinte ; mais, dans un cas semblable à celui de lord Dalgarno et de Votre Seigneurie, les avis pourraient être partagés. Il faut donc que vous m’accompagniez sur-le-champ ici tout près, dans mon humble appartement, et que vous vous soumettiez à quelque changement de costume avant d’entrer dans le sanctuaire, sans quoi toute la canaille d’Alsace tombera sur vous, comme les corbeaux sur un faucon qui s’est abattu parmi eux. Il faut que nous vous habillions d’une manière un peu plus semblable aux habitants de l’Alsace, ou vous ne trouverez pas moyen d’y vivre. »

Tout en parlant, Lowestoffe entraînait lord Glenvarloch dans son logement, où il avait une jolie bibliothèque garnie de tous les