Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/227

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n’ignorait pas tout à fait la rigueur arbitraire du jugement de la chambre étoilée, particulièrement en fait de violation de privilèges, ce qui faisait qu’elle excitait la terreur générale ; et pas plus tard que du temps de la reine, il se rappelait avoir entendu dire que la peine de mutilation avait été prononcée et exécutée pour un délit du genre de celui qu’il avait commis. Autre réflexion aussi peu consolante : la violente querelle qu’il venait d’avoir avec lord Dalgarno allait lui faire perdre l’amitié et les bons offices du père et de la sœur du jeune lord, qui étaient presque les seules personnes de considération dont il pût invoquer le crédit, tandis que les bruits calomnieux qui avaient couru sur son compte auraient nécessairement un poids énorme dans un cas où la réputation de l’accusé devait avoir la plus grande influence sur sa cause. Pour une jeune imagination, l’image de la mutilation avait quelque chose de plus effrayant que la mort même, et chaque parole qu’il entendait parmi les groupes qu’il rencontrait, et laissait derrière lui, ou auxquels il se mêlait sur la route, lui confirmait que tel devait être le châtiment de son délit. Il craignait de trop hâter le pas, de peur d’éveiller le soupçon, et plus d’une fois il vit les officiers et les gardes du parc si près de lui, qu’il se sentit tressaillir les nerfs du poignet, comme s’il était déjà sous le coup de la hache fatale. À la fin, il sortit du parc, et eut un peu plus de loisir pour réfléchir sur ce qu’il avait à faire.

White-Friars, bâtiment adjacent au Temple, bien connu alors par le surnom d’Alsace, avait dans ce temps, et conserva encore pendant près d’un siècle le privilège d’être un sanctuaire inviolable, où ne pouvaient pénétrer que les mandats du lord chef de la justice, ou des lords du conseil privé. Et même, comme ce lieu était peuplé de gens couverts du mépris public… banqueroutiers, joueurs ruinés, dissipateurs sans ressources, duellistes de profession, spadassins, homicides et mauvais sujets de toute espèce… tous ligués ensemble pour soutenir les privilèges de leur asile, il était à la fois difficile et dangereux pour les officiers de justice de mettre à exécution des mandats émanant même des premières autorités, au milieu de gens dont la sûreté était incompatible avec tout mandat, toute autorité quelconque. Lord Glenvarloch savait parfaitement cela, et tout odieux que lui fût un semblable lieu de refuge, il le regardait comme le seul où il pût se cacher pendant les premiers moments, afin d’échapper à la poursuite de la loi jusqu’à ce qu’il trouvât moyen de pourvoir défi-